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La guerre est devenue un moyen de gouverner
Capitaine Martin

Les gouvernements actuels suivent à la lettre la leçon de Bush. C’est comme chefs de guerre que les gouvernants créent le mieux l’adhésion. Face au chômage, il faut inventer des solutions et affronter la logique du profit. Quand on prend l’uniforme du chef de guerre, c’est tout de suite beaucoup plus facile, surtout dans un pays dont l’armée reste malgré tout l’une des mieux entraînées du monde.

Le lendemain des attentats coordonnés, perpétrés dans Paris le 13 novembre 2015, le gouvernement français a naturellement déclaré l’état d’urgence. Sous cet état d’exception, la police et d’autres institutions, notamment le ministère de l’Intérieur et les préfets (représentants locaux de l’État) se sont vues conférer un large éventail de pouvoirs, dont celui de perquisitionner des logements de jour comme de nuit et d’émettre des arrêtés d’assignation à résidence sans que l’autorisation d’un juge soit nécessaire.

L’état d’urgence a été prolongé de trois mois, une première fois le 26 novembre 2015, puis de nouveau le 26 février 2016, et de deux mois le 26 mai 2016. Il a depuis été régulièrement prolongé, officiellement dans le but de couvrir la période des élections nationales, prévues en avril-mai 2017.

« Rien ne sera plus comme avant » avaient déclaré certains journalistes et hommes politiques après les attentats qui ont frappé la France. L’intensification des politiques et pratiques sécuritaires préexistantes ne s’est pas fait attendre. Mise en accusation des salafistes, des musulman-e-s, de l’islam ou des immigrés en général. À la parole des politiques, s’est joint l’acte... policier. Selon les chiffres publiés le 6 décembre 2016 par le gouvernement, depuis novembre 2015, 4.292 perquisitions de domiciles avaient été menées et 612 personnes avaient été assignées à résidence (et 434 personnes affectées). Par ailleurs, en décembre 2016, 95 personnes étaient encore assignées à résidence. Rappelons qu’en février 2016, Amnesty International a rapporté que moins de 1 % des perquisitions de domiciles menées entre novembre 2015 et février 2016 (soit plus de 3.000) avaient donné lieu, au regard de la législation française, à des chefs d’accusation pour activités à caractère terroriste (excepté les infractions pour « apologie du terrorisme »), ce qui révèle à quel point cette mesure était disproportionnée...

La situation des migrants s’en est naturellement ressentie et les politiques orchestrées en la matière par l’Union européenne tendent à organiser les contrôles abusifs, la destruction des bateaux, les rafles et les chasses à l’homme avec leurs corollaires : enfermement de milliers d’êtres humains, absence d’accès aux droits les plus élémentaires, expulsions, refoulements, harcèlement, isolement.

Ces politiques et leur relais dans les médias construisent dans la population un imaginaire d’une Europe assaillie par un danger migratoire. Tout ceci pousse à un racisme de plus en plus décomplexé, assumé et revendiqué. Les passages à l’acte (violence raciste, organisations de riverains voulant « faire justice eux-mêmes », manifestations et émeutes, tabassages, expulsions illégales, menaces) sont de plus en plus fréquents. Les pouvoirs publics et leurs forces de police au mieux ferment les yeux sur la situation, au pire poussent à ces passages à l’acte qui leur facilitent la tâche et correspondent à des objectifs politiques.

Bien entendu, les causes des migrations et les causes de leur visibilité actuelle, dont les pays européens sont directement et évidemment responsables, ne sont jamais énoncées dans les discours sur les migrations actuelles. La France était pourtant en guerre bien avant les attentats, lesquels ont largement servi de prétexte à intensifier ces engagements militaires. Ces dernières années, l’armée française est intervenue massivement en Afrique. La guerre est ainsi devenue un des derniers points forts des derniers mois de la présidence de Nicolas Sarkozy avec l’opération Harmattan en Libye mais aussi avec le passage à l’offensive de la force Licorne en Côte d’Ivoire pour faire tomber le régime de Laurent Gbagbo. Marchant dans les pas de son prédécesseur, François Hollande endosse pleinement le costume de chef des armées. L’opération Serval au Mali en 2013 qui se métastase à partir de l’été 2014 dans les pays de la sous-région avec l’opération Barkhane est emblématique du retour en force du militaire comme pilier de l’influence française dans ses anciennes colonies africaines. Sangaris, en République centrafricaine, vient conforter cette politique. Présentées officiellement comme des victoires, ces interventions posent en réalité éminemment question.

L’intervention en Libye a eu des répercussions particulièrement néfastes sur le Mali. Dans ce pays, la France est intervenue pour combattre les groupes armés implantés dans le nord mais a, dans le même temps, remis en selle le Mouvement national pour la Libération de l’Azawad (MNLA), pourtant à l’origine de la crise. Avec Barkhane, et au nom de la « guerre contre le terrorisme », l’armée française est désormais durablement implantée au Burkina Faso et au Niger, tout en relégitimant la dictature d’Idriss Déby au Tchad en en faisant le point nodal de ses guerres africaines. Enfin, en Centrafrique, la France s’est embourbée dans une guerre civile d’une rare violence dont elle était en même temps juge et partie.

Ces conflits doivent être désignés par leur nom : ce sont des guerres d’ingérence impérialiste. La France n’a aucun « rôle positif » dans ces interventions, malgré ses prétentions puisées à l’ancien répertoire colonial. Le discours belliciste entend anesthésier et tétaniser la population. Pourtant, comment ne pas rappeler les désastres que sèment ces guerres, les millions de morts, de blessés et de déplacés, la misère, le désespoir jetant les populations sur les routes, tandis que s’enrichissent les profiteurs de guerre, les multinationales vendeuses d’armes – la France tenant en la matière le quatrième rang mondial. Ce sont aussi des dépenses colossales, qui détournent l’argent public de dépenses sociales, culturelles et écologiques vitales. De surcroît, l’État qui mène ces guerres, en pompier pyromane, nous entraîne dans une spirale infernale ayant pour effet de renforcer la haine qui débouchera sur d’autres attentats. Les Rafale tuent des civils aussi innocents que ceux du Bataclan ou de Nice. Ces bombardements sont des bombes à retardement.

L’état de guerre proclamé encourage les peurs et crée la division. Le gouvernement socialiste a sapé l’État de droit et les droits humains, entretenant le racisme et la xénophobie tout en semant les germes de nouvelles violences et de nouveaux conflits. Les discours alarmistes et anxiogènes déclamés ici et là ainsi que la désignation d’ennemis intérieurs ont servi et servirons encore à légitimer des mesures disproportionnées qui portent atteinte aux droits fondamentaux, dans le but de mieux contrôler la population. La guerre est désormais devenue un moyen de gouverner ; elle est aussi une guerre sociale.

Capitaine Martin

 
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