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Le point sur la situation au Venezuela. Entre exagérations et réels dangers
Bruno Stas (ICS)

Mais que se passe-t-il au Venezuela ? Depuis quelques semaines, de nombreux articles annoncent la faillite économique du pays, la chute prochaine du régime sous la pression des dettes qui s’accumulent suite à la mauvaise gestion du pays. Explications.

Comme vous le savez sans doute, la réserve de pétrole vénézuélienne est considérée selon les sources, en lutte avec l’Arabie Saoudite, comme une des plus importantes au monde et est considérée pouvoir continuer à fournir du pétrole pour les 200 prochaines années. Or, alors que la demande mondiale se réduit, l’Arabie Saoudite a décidé de ne pas baisser sa production. Le prix du baril du pétrole a dès lors baissé drastiquement. Ainsi, alors qu’il voguait allègrement au-dessus des 100$ le baril depuis cinq ans, le prix a soudainement chuté aux alentours des 50$ actuellement (1).

Cela rend visible de la manière la plus cruelle qui soit que la grande force du Venezuela en est probablement également sa principale faiblesse. En effet, si la révolution bolivarienne a globalement réussi le défi de diriger les revenus du pétrole vers les aspects sociaux de sa politique, elle n’a par contre jamais réussi à enclencher une véritable diversification de son économie. Du coup, aujourd’hui, 95 % des exportations du pays sont liées au pétrole, tandis qu’un quart de l’économie nationale en dépend (2).

Par ailleurs, un énorme phénomène de pénurie mine le marché intérieur vénézuélien. La banque du Venezuela a ainsi publié un « indice de rareté », qu’elle évalue à 29 %. C’est-à-dire que sur un panier de 100 produits de consommation, 29 sont déclarés comme (très) difficile à trouver. S’il n’est pas possible d’attribuer de manière mécanique la paternité de ces pénuries à l’opposition, force est de constater que l’accaparement par ceux-ci de hangars entiers de ces produits de consommation est devenue leur principal outil dans leur guerre de déstabilisation du gouvernement en place. Les cas les plus connus sont ceux du lait et du papier toilette, mais des dizaines de tonnes de produits en pénurie sont retrouvés régulièrement par les autorités dans des hangars appartenant à des soutiens avérés de l’opposition (3).

Pour ne rien faciliter, le Venezuela se bat depuis un an avec une inflation qui atteint des sommets. En effet, en 2014, l’inflation vénézuélienne a atteint le palier inquiétant de 63,6%. La situation ne s’améliorant pas, le parlement, a déclaré officiellement le pays en récession au mois de décembre passé.
Augmentation des entreprises de déstabilisation

L’opposition vénézuélienne et les États-Unis, à l’affût de tout ce qui pourrait affaiblir la révolution bolivarienne, n’ont pas tardé à accélérer le mouvement. Ainsi, deux des agences de notation les plus influentes ont dévalué au cours du dernier mois la note du Venezuela et lui attribuent désormais la pire note de leur classement. En décembre, Fitch décidait la première de faire passer sa note de B à CCC alors qu’en janvier Moody’s réévaluait à son tour sa note, de Caa1 à Caa3 (4 et 4b). Évidemment, cela a encore empiré la situation économique du pays.

L’opposition inbterne n’est pas en reste. Fin janvier, elle a d’ailleurs organisé une « marche des marmites vides », un slogan choisit pour dénoncer les pénuries qui sévissent dans le pays. Mais le constat est clair : l’opposition peine à rassembler. En effet, malgré la présence de plusieurs leaders, quelques milliers de personnes à peine étaient présentes ce samedi à Caracas. Ceci ne les empêche évidemment pas de redoubler leurs efforts pour aggraver la situation économique du pays. Le président du parlement vénézuélien dénonçait de cette manière il y a quelques jours la pratique de chaînes de distribution qui consiste à travailler en sous-effectif et d’affecter le peu de travailleurs à des tâches de rangement plutôt que de travailler en caisse. Cela afin de faire monter la contestation populaire(5). Par ailleurs, des hangars remplis de denrées en pénurie continuent à être découvert chaque jour à travers le pays, spécialement le long de la frontière avec la Colombie (6).

De son côté, le Sénat américain adoptait, début décembre 2014 – dans la foulée de la décision de Barack Obama de relâcher les Cuban Five et sa volonté affichée de détendre le blocus avec Cuba – des mesures répressives à l’encontre du gouvernement vénézuélien. Par ce geste, ils annoncent vouloir sanctionner le gouvernement vénézuélien pour sa répression jugée violente face aux manifestations d’il y a un an (voir cadre ci-contre). Par ce geste, ils montrent surtout la couleur aux vénézuéliens : ce n’est pas parce qu’ils lâchent du lest vis-à-vis de Cuba que la révolution bolivarienne serait soudainement sortie de leur viseur.

Aux États-Unis, il ne se passe d’ailleurs pas un jour ces dernières semaines sans qu’un article contre le gouvernement vénézuélien ne soit publié. Certains n’hésitant pas à virer carrément dans le loufoque, plusieurs journaux relayant par exemple l’information selon laquelle le Venezuela dispose de l’arme nucléaire et qu’ils sont prêts à l’utiliser contre New York (7).

La situation économique du Venezuela est inquiétante et le pouvoir y est à un tournant. Pour l’instant, rien n’indique que la population ne soutienne plus Maduro et son gouvernement, au contraire. Mais économie et politique sont intimement liées, les ennemis de la révolution bolivarienne le savent et augmentent la pression sur le gouvernement. Dans ce sens, l’enjeu pour le gouvernement est tant de réussir à contenir les attaques – directes et indirectes – que commettent ceux qui ont intérêt à ce que le pouvoir vacille que de maintenir ses programmes sociaux malgré la chute vertigineuse du pétrole sur le marché mondial.
Une situation inéluctable ?

Malgré tout, il y a quelques raisons de croire qu’il soit possible d’enrayer la spirale négative. La première raison est le voyage tout récent qu’ont effectué le président et certains de ces ministres en Chine à l’occasion de la première rencontre entre des hauts officiels chinois et des représentants de quasiment tous les pays du CELAC (la communauté des pays de l’Amérique Latine et des Caraïbes). Il semblerait qu’ils aient pu y atteindre un accord des investissements chinois dans le pays à hauteur de $20 milliards. Par ailleurs, la Chine se serait également engagée à doubler le nombre de barils qu’elle achète au Venezuela (actuellement 500 000 barils par jour) (7).

Sur le chemin du retour, le successeur d’Hugo Chavez s’est rendu en Iran et au Qatar, deux autres pays membres de l’OPEP (l’Organisation des Pays Producteur de Pétrole). Il a ensuite déclaré que des « mesures seraient bientôt prises pour que le cours du pétrole revienne bientôt où il devrait être ». Il y aurait également reçu un nouveau crédit qatari.

Par ailleurs, le gouvernement vénézuélien devrait bientôt dévaluer sa monnaie afin de relancer la compétitivité du bolivar sur le marché mondial. Sur le marché interne, il devrait relancer l’économie avec des mesures positives telles, entres autres, que le relèvement du salaire minimum (il a déjà été relevé de 68,28 % en 2014 pour éviter qu’il ne soit rogné par l’inflation), ou la réactivation de l’agriculture familiale en petite surface.

Enfin, contrairement à ce qui se passe en Europe, le gouvernement a confirmé la hausse prévue des budgets consacré au social, financé en majeure partie par des ressources non-pétrolières. Le chômage continue quant à lui sa baisse, et concerne à présent 5,9 % de la population (8).

Le contexte politique en 3 minutes

En 1998, Hugo Chavez est élu président du Venezuela avec un programme ouvertement bien à gauche. Avant cela, les rentrées du pétroles servaient uniquement à remplir les poches d’une poignée d’industriels vénézuéliens et d’homme d’affaires étasuniens. Chavez décida de changer drastiquement de cap et lança des plan sociaux grâce aux rentrées du pétroles. Avec des résultats spectaculaires. Entres autres accomplissement effectués grâces aux revenus nouvellement générés de catte manière, l’analphabétisme et l’extrême pauvreté furent bientôt éradiqués. Cela ne plut pas à Washington, et le fait que Chavez devienne populaire dans le reste de la région encore moins.

Depuis ’98, l’opposition, soutenue et encadrée par les USA, essaie par tous les moyens de déstabiliser le gouvernement, de le faire tomber. Citons entres autres un coup d’État, un lock out des patrons, des manifestations violentes, un boycott des élections, des actions de sabotages, etc. Ces agressions étant par ailleurs renforcées et soutenues par une guerre médiatique permanente contre la révolution bolivarienne.

Ce qu’il se passe actuellement n’est par ailleurs pas sans rappeler les événements d’il y a un an. En effet, il y a tout juste un an, l’opposition vénézuélienne organisait une campagne internationale de déstabilisation économique et médiatique du gouvernement. Cette attaque faisait écho à la 18e défaite électorale en 16 ans, sur un total de 19 scrutins organisés. La première contre Nicolas Maduro. Espérant profiter de ce qu’ils interprétaient être une baisse du soutien populaire au gouvernement, l’opposition mobilisa ses troupes – sur Twitter et dans la rue - et passa littéralement à l’action.

Ainsi, des milliers de messages affluent rapidement sur les réseaux sociaux, dénonçant les magasins vides, des atrocités commises par la violence répressive du gouvernement ainsi qu’une guerre civile généralisée. Des photos d’atrocités commises par les autorités viennent appuyer les dénonciations. Nos médias, rapidement, relayent l’info tous azimuts.

Pourtant, il devient très vite évident pour les observateurs attentifs qu’en fait de guerre civile il s’agit d’une minorité de manifestations isolées et confinées aux quartiers huppés de la capitale (1). En fait, les photos de massacres émanent de la violence répressive des gouvernements d’Égypte, du Chili, de Turquie ou de Grèce (2). Comme expliqué plus haut, la pénurie, bien réelle, apparaît comme le résultat d’une stratégie de l’opposition plutôt qu’à une mauvaise gestion du gouvernement. Ainsi par exemple, rien qu’aux mois de janvier et février 2013, ce sont de plus de 50 000 tonnes d’aliments qui sont de cette manière découverts et récupérés par les autorités (3).

Moins de deux ans après son accession à la présidence, Nicolas Maduro est devant un test historique, où les Etats-Unis et l’opposition semblent bien déterminé à appliquer la dernier poussée fatale dans le dos du gouvernement pour le faire finalement tomber. Mais les signes ne montrent jusqu’à maintenant aucune volonté de la part du peuple vénézuélien de laisser tomber sa révolution.

(1) : http://www.intal.be/fr/article/venezuela%C2%A0-une-enieme-tentative-de-destabilisation
(2) : http://www.mondialisation.ca/mensonges-et-omissions-mediatiques-sur-le-venezuela/5374760
(3) : http://www.legrandsoir.info/25-verites-sur-les-manifestations-au-venezuela.html

 
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