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Un échange de prisonniers avec Cuba (New York Times)

Le point de vue exprimé ci-dessous n’est évidemment pas exactement celui de Changement de Société. Nous ne considérons pas Cuba comme un « Etat policier » ni les projets de déstabilisation de Washington comme « démocratiques ». Cet article méritait cependant d’être traduit, pour ce qu’il indique de l’actuel réchauffement des relations entre Cuba et les Etats-Unis. On aura à ce sujet noté les remerciements de John Kerry concernant l’implication de Cuba dans la lutte contre le virus ébola. Si cette tendance devait continuer, l’espoir d’une libération des trois derniers héros cubains enfermés à Miami pourrait se concrétiser assez vite. On pourrait peut-être même oser rêver, à plus ou moins long terme, d’une levée du blocus imposé par les Etats-Unis à la petite île révolutionnaire. (Note de Marc Harpon)

Il y a près de cinq ans, les autorités cubaines ont arrêté un sous-traitant de l’Etat américain, Alan Gross, qui travaillait pour un programme secret d’expansion de l’accès Internet sur l’île. Alors que de plus en plus de dirigeants à Washington et à La Havane souhaitent ardemment engager la normalisation des relations, la prolongation de l’incarcération de M. Gross est devenu un obstacle majeur à une avancée diplomatique.

Il n’y a qu’une façon possible de faire sortir M. Gross d’une équation déjà compliquée. Le gouvernement Obama devrait l’échanger contre les trois espions cubains condamnés qui ont passé plus de 16 ans dans une prison fédérale.

Les fonctionnaires de la Maison Blanche sont évidemment inquiets des retombées politiques d’un éventuel accord avec La Havane, étant données les critiques essuyées en mai après l’échange de trois prisonniers américains kidnappés en Afghanistan. Le gouvernement américain, non sans raison, est réticent à négocier avec des terroristes ou avec des Etats qui retiennent des citoyens américains comme rançon ou comme outil politique. Mais dans des circonstances exceptionnelles, ce type de choix est pertinent. Le cas Alan Gross répond à ce critère.

Sous la direction de Development Alternatives, qui était sous-contrat avec l’Agence Américaine pour le Développement International (USAID, ndt), M. Gross est allé cinq fois à La Havane en 2009, en se faisant passer pour un touriste, pour passer des équipements de communication, dans le cadre d’une tentative de fournir plus d’accès Internet aux cubains. L’Etat cubain, qui proteste depuis longtemps contre les initiatives secrètes de Washington en faveur de la démocratie, a jugé et condamné M. Gross en 2011 à 15 ans de prison pour atteinte à l’intégrité de l’Etat.

Très tôt, des dirigeants cubains ont suggéré qu’ils pourraient accepter de le libérer si Washington mettait un terme aux projets de renversement du gouvernement cubain. Après l’échec de ces premiers échanges, la position cubain s’est durcie et il est devenu évident pour les fonctionnaires américains que la seule façon réaliste récupérer M. Gross impliquait de libérer les espions cubains reconnus coupables de crimes fédéraux à Miami en 2001.

Pour un échange de prisonniers, le Président Obama aurait à commuer la peine des condamnés. Cela serait justifié, étant donné le temps déjà purgé, les questions troublantes sur l’impartialité de leur procès et les retombées diplomatiques d’un premier pas vers une nouvelle relation bilatérale.

L’espion le plus important pour l’Etat cubain, Gerardo Hernandez, purge deux condamnations à vie. M. Hernandez, le leader du Réseau de Veille, qui a infiltré les groupes de cubains exilés au Sud de la Floride en 1990, a été condamné pour association de malfaiteurs en vue de commettre un meurtre. Les procureurs l’ont accusé d’avoir conspiré avec les autorités de La Havane pour abattre des avions civils ayant survolé l’île pour lâcher des brochures appelant les cubains à se soulever contre leur gouvernement. Ses quatre co-accusés, dont deux ont été libérés et sont rentrés chez eux, ont été condamnés de crimes non-violents. Les deux autres encore incarcérés doivent être libérés dans relativement peu de temps.

Un panel de trois juges de la Cour d’Appel des Etats-Unis pour le Onzième Circuit a annulé les condamnations en août 2005, statuant qu’un « parfait ouragan » de facteurs avait privé les cinq accusés d’un procès équitable. Les juges sont arrivés à la conclusion que l’hostilité générale envers le gouvernement cubain à Miami et le battage médiatique qui, avant le procès, avait diabolisé les espions, avait rendu impossible la composition d’un jury impartial. La cour avait ensuite renversé en plénière les conclusions du panel, rétablissant les condamnations. Mais les juges avaient émis d’autres doutes au sujet de l’affaire, ce pourquoi trois des sentences ont été réduites.

Un des juges, Phyllis Kravitch, a publié une opinion discordante, avançant que la condamnation de M. Hernandez pour association de malfaiteurs/meurtre n’était pas fondée. Les procureurs, avançait-elle, ont échoué à établir que M. Hernandez, qui avait fourni à La Havane des informations sur les vols, était tombé d’accord pour abattre les avions dans l’espace aérien international, plutôt que dans l’espace aérien cubain. Abattre les avions dans l’espace aérien cubain, qui les exilés avaient pénétré auparavant, n’aurait pas été un meurtre selon le droit américain.

Ramener chez lui M. Hernandez, est devenu une priorité majeure pour le président cubain, Raul Castro. Les dirigeants cubains ont salué les cinq hommes comme des héros et présenté leur procès comme une mascarade. Des entités indépendantes, y compris un panel des Nations Unies qui examine les cas de détentions arbitraires et Amnesty International, ont soulevé des questions sur la justice des procédures. Le point de vue, répandu à Cuba, que les espions cubains sont des victimes, a malheureusement enhardi Cuba dans sa volonté d’utiliser M. Gross comme monnaie d’échange.

Des années durant, les dirigeants de Washington ont dit qu’ils n’échangeraient pas les espions cubains contre M. Gross, avançant que l’échange reposerait sur une fausse « équivalence ».

Mais un échange de prisonnier ouvrirait la voie à une réouverture de relations diplomatiques formelles, permettant ainsi aux Etats-Unis d’encourager des changements positifs à Cuba, à travers des opportunités élargies de commercer et de voyager et des contacts plus nombreux entre américains et cubains. Ne pas saisir l’occasion maintiendrait un cycle de 50 ans de méfiance et de sabotages de part et d’autre.

Au-delà des mérites stratégiques d’un échange, le gouvernement a le devoir de faire plus pour ramener chez lui M. Gross. Son arrestation résulte d’une stratégie imprudente dans laquelle l’USAID a utilisé massivement les sous-traitants privés pour accomplir des missions risquées dans un Etat policier violemment opposé à la croisade démocratique de Washington.

En prison, M. Gross a perdu plus de 45 kilos. Il perd la vue de l’oeil droit. Ses hanches s’affaissent. En juin, la mère âgée de Gross est morte. Après ses soixante cinq ans, M. Gross a dit à ses proches que cette année serait sa dernière année de captivité, les prévenant ainsi qu’il avait l’intention de se tuer s’il n’était pas libéré bientôt. Sa famille et ses amis prennent au sérieux cette menace faite par un homme brisé et désespéré.

Si Alan Gross mourait sous garde cubaine, la perspective d’une relation plus saine avec Cuba serait repoussée de plusieurs années. On peut absolument éviter ce scénario, mais il faut faire vite.

source : The New York Times, 02 novembre 2014 http://www.nytimes.com/2014/11/03/opinion/a-prisoner-swap-with-cuba.html?_r=0

traduit de l’anglais par Marc Harpon pour Changement de Société

 
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