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Pourquoi et comment une « autre Europe » ? Indignation et colère, suite aux élections européennes
Jean-Pierre ADAMI

Les résultats des élections européennes du 25 mai et le contexte politique qui les explique ne peuvent être que source d’indignation et de colère. Ces sentiments doivent être largement partagés, car, sans une réaction populaire et une vigilance accrue, les évolutions en Europe et en France sont porteuses de nouvelles dégradations quant aux droits sociaux et aux libertés individuelles, d’autant plus si la gauche de transformation sociale continue à être relativement impuissante.

Indignation quant aux options économiques et sociales mises en œuvre par la droite libérale et la social-démocratie au sein de l’Union Européenne (UE) ; options qui accompagnent, voire anticipent les transformations du capitalisme mondialisé, en application des thèses ultra-libérales de Milton Friedman élaborées dans les années 70. Ces orientations exploitent les peuples au bénéfice du capital et font progresser mécaniquement les partis d’extrême-droite en banalisant leur idéologie.

Indignation quant aux choix des élites politiques de la Droite, du Centre, de la social-démocratie et des Verts qui, parce qu’ils ont entériné tous les Traités, les Pactes et les Stratégies depuis l’Acte Unique de 1986, sont largement responsables de la politique actuelle de l’UE et de ses conséquences austéritaires. Indignation renforcée par le double langage de ces dirigeants, qui, tout en critiquant les divers aspects de la politique de l’UE, veulent aller plus loin en prônant un fédéralisme qui limiterait encore plus l’autonomie et l’orientation politique des différents pays.

Indignation quant aux conséquences sociales de la politique social-libérale mise en œuvre par les responsables de la majorité présidentielle actuelle (PS, PRG et EELV), avec la cohorte des dégâts sur les acquis sociaux, le droit au travail, les dépenses publiques et sociales..., politique dévastatrice pour les classes populaires qui constatent la fin des conquêtes du CNR. Le peuple de gauche, pour manifester son désarroi et son opposition à cette politique, s’est abstenu massivement. La gauche, lors du scrutin du 25 mai, atteint 32% d’exprimés, loin du score de François Hollande en mai 2012.

Indignation quant au fait que la France, pays des Droits de l’Homme, soit représentée au Parlement Européen par 24 députés d’extrême-droite, parti qui prône la xénophobie, l’obscurantisme et le repli sur soi. Ce résultat est la manifestation d’un sentiment de déclassement, de relégation sociale et d’inquiétude d’une précarisation pour soi et sa descendance. Ce nombre de députés s’explique aussi par le fort taux d’abstentions, en particulier, du peuple de gauche meurtri par la politique libérale actuelle. En effet, avec 10 % des inscrits et un score de 4 711 399 voix en 2014, chiffre largement inférieur à celui de la Présidentielle en 2012 avec 6 421 426 voix (soit 1 710 087 en moins), l’extrême-droite rafle un tiers des députés français à Bruxelles. Ce résultat s’explique également par la promotion médiatique des responsables de ce parti, par une grande partie de la presse écrite et audiovisuelle (notamment les médias du service public), avec une implication particulière des chaines d’information en continu.

Face au constat de cette première partie, il est impératif de créer les conditions en France et en Europe pour que l’UE se transforme afin que celle-ci réponde aux besoins sociaux des citoyens de chaque pays. Pour combattre l’austérité destructrice des acquis et liens sociaux, il faut construire un cadre de résistance dans l’unité la plus large, pour imposer une autre Europe. Pour cela il faut créer un rapport de force autour des principaux objectifs suivant : s’opposer frontalement au niveau de l’UE, à la droite libérale, au centre et à la social-démocratie qui prônent plus de libéralisme économique, dans le cadre d’un capitalisme mondialisé, ainsi que plus de fédéralisme ; combattre l’austérité, en Europe et en particulier en France, cause principale de la progression de la montée des idées de l’extrême-droite ; contraindre les futurs responsables de la Commission Européenne de rejeter le futur projet du traité TAFTA ; combattre également en France, toute dérive sociale libérale de la majorité présidentielle (PS, PRG et EELV), afin de s’opposer aux dégâts sociaux et culturels actuels ; élaborer, avec le mouvement social, des propositions alternatives qui débouchent sur une adhésion populaire et pas seulement sur un simple refus de la politique de Hollande /Valls.

L’indignation développée ci- dessus renvoie essentiellement à des aspects extérieurs au Front de Gauche (FdG). Cependant, je ne peux passer sous silence les problèmes internes de cette structure, qui en 2009 était pourtant porteuse d’immenses espoirs. Ma colère porte sur les tensions survenues au sein du FdG ces derniers mois. De mon point de vue, ces tensions sont essentiellement le résultat de comportements contestables, voire irresponsables, de la part des leaders du Parti de Gauche(PG). Pour une part non négligeable, le mauvais score du FdG lors des derniers scrutins, et en particulier celui du 25 mai, s’explique par ces tensions. Constat regrettable, car après les 11% de la présidentielle de 2012, tous les espoirs étaient permis pour les élections européennes. Je rappelle qu’en juin 2013, un sondage pour le site Huffington-post et I-Télé donnait 15% d’intentions de votes aux élections européennes pour le FdG, score comparable à celui du PS.

Sous-couvert de stratégies différentes, pour les élections municipales, de certaines composantes du FdG, le PG a complètement brisé la dynamique de cette structure pendant plusieurs mois, ce qui explique largement les mauvais résultats aux élections européennes. Ces dissensions stratégiques ont, sans aucun doute, plombé également la dynamique du FdG aux élections municipales, ce qui a eu pour effet que nous soyons battus dans plusieurs municipalités et a failli nous en faire perdre d’autres.

A ce sujet, je suis indigné par l’incohérence ou le double langage des dirigeants du PG sur la stratégie pour les élections municipales. Ils contestent le choix du PCF pour des listes d’union avec le PS (majorité présidentielle) sur la base d’un programme, alors que depuis les législatives de 2012, ils préparaient un programme avec EELV (majorité présidentielle) pour la ville de Grenoble afin de présenter une liste d’union. Où est la logique ? Le bilan des élections municipales, sans minimiser la responsabilité du pouvoir, montre le caractère inadapté de la stratégie qu’a voulu imposer le PG.

Ce constat d’échec, résultat des atermoiements du PG, s’applique aussi pour les élections européennes. Verser une larme le soir du 25 mai ne dédouane en rien la responsabilité politique de la direction du PG. Les attitudes de celle-ci, ces derniers mois, expliquent pour une large part la démobilisation de l’électorat du FdG et son score plus que modeste. Certes, les élections européennes sont peu mobilisatrices, mais face à la politique d’austérité du pouvoir, le FdG n’est pas apparu comme une alternative crédible pour avoir montré pendant plusieurs mois, du fait du PG, des dissensions qui n’avaient pas lieu d’être, surtout pour les européennes, scrutin fondateur en 1999 . Le choc découlant du résultat de ce scrutin est tel, que je juge salutaire, de caractériser les causes de mon indignation et de donner mon point de vue pour aider, modestement, le FdG à construire une alternative de gauche audible.

Je suis indigné quant au refus par le PG d’entrer en campagne, pour les européennes, dès le début de l’année 2014, date pourtant souhaitée par les autres composantes du FdG. Indignation d’autant plus grande que le PG a refusé de mettre en place une coordination de campagne au sein du FdG, alors que dans le même temps celui-ci était en campagne pour ses propres candidats.

Indignation, quant au chantage du PG sur la composition des listes aux européennes, afin d’obtenir trois têtes de liste au détriment du PCF (deux seulement) et en fragilisant la seule candidature citoyenne, manœuvre qui a eu également pour effet de marginaliser les candidats de la Gauche Unitaire. Ce chantage à la survie du FdG n’est pas acceptable, quand on voit les dégâts sociaux de la politique actuelle. Colère également contre les tentations de la remise en cause du programme du FdG « L’Humain d’abord » et contre l’hypothèse formulée, sans aucune discussion en son sein, d’une sortie de l’Euro.

Indigné quant à l’expression récurrente des responsables du PG dans les médias, qui, sous couvert de « radicalité concrète », manient trop souvent la diatribe, les oukases, des positions contestataires sans les associer systématiquement à des propositions constructives. De plus, les attaques virulentes à l’encontre les journalistes, ad hominem, et non en tant que maillons d’un système médiatique sclérosé par les puissances d’argent ou relais de connivences politiciennes sont contreproductives. A ce sujet, les médias, du service public compris, utilisent ces dérives pour plomber le FdG, en invitant quasi systématiquement les responsables du PG pour s’exprimer au titre du FdG, au détriment des autres composantes. Attitude d’autant plus inacceptable, que le FdG est largement marginalisé dans les médias, contrairement à l’extrême-droite.

Indigné quant au discours des responsables du PG qui laissent entendre que le salut du peuple de gauche, c’est l’homme providentiel qui, contre toute logique des rapports de force actuels, deviendrait « le calife à la place du calife ». Cette captation personnaliste est vraiment de mauvais alois. Dans le même esprit, l’attitude de certains responsables du PG, transfuges du PS, peut apparaître comme étant la continuité de la stratégie de François Mitterrand dans les années 80, qui avait pour but de marginaliser le PCF. Enfin, les interventions pour débaucher certains responsables du PS et d’EELV dans des termes peu rassembleurs, sont inadaptées et contreproductives car elles provoquent inévitablement le refus des personnes concernées.

Devant ce constat, il est urgent de faire un bilan de cette période en caractérisant les dérives, les écueils et refonder sur des bases saines et claires la stratégie du FdG, afin que celui-ci soit au service des victimes des politiques actuelles, qu’elles soient ultra- libérales ou social-libérales. Il est impératif de mettre en perspective des axes stratégiques pour que le FdG soit plus soucieux de la souffrance des français, que de ses débats internes, afin de répondre aux besoins urgents des classes populaires.

Sur cette dernière partie, concernant les critiques de la dynamique au sein du FdG, je suis tout à fait à l’aise pour exprimer mon point de vue. En effet, je ne suis encarté dans aucun parti ou composante du FdG. Mes seules motivations sont de m’investir pour répondre à une nouvelle dynamique, afin de construire une alternative audible, ce qui implique une réorganisation interne autour de plusieurs axes, et ainsi de redonner du sens à l’action politique : favoriser l’implication citoyenne ; mettre en œuvre une politique d’ouverture vers tous les acteurs sociaux (partis, associations, syndicats...) ; respecter la diversité des sensibilités politiques ; construire, sur des bases claires et programmatiques, l’unité la plus large ; tendre la main avec respect vers les déçus de la majorité actuelle ; recréer des liens de solidarité entre tous les citoyens de la classe exploitée par le capital ; favoriser un épanouissement culturel de tous ; répondre à l’urgence écologiste ; renforcer l’inspiration citoyenne, afin de redonner une espérance communiste.

Jean-Pierre ADAMI

 
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