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Le régime colombien augmente son offensive militaire contre les FARC avec le soutien nord-américain
Les oiseaux de la guerre
Loic RAMIREZ

« Avec leur long et fin fuselage bombé à l’avant pour accueillir une antenne satellite, leurs ailes étroites et leurs dérives arrière inclinées, ces appareils ressemblent à d’inquiétants insectes » rapportent les journalistes Laurent Checola et Edouard Pflimlin [1]. Devenus la terreur des insurgés afghans et de la population pakistanaise, les drones disputeront-ils le ciel andin au Condor ? Encouragée par de récentes offensives victorieuses contre la guérilla des Farc, Bogota s’est empressée de demander un soutien plus prononcé à son vieil allié de Washington. Selon le propre chef des Forces Armées des Etats Unis, le général Martin Dempsey, les fonctionnaires colombiens ont demandé « plus d’hélicoptères, des avions espions, des drones et une collaboration dans le renseignement comme faisant partie de la nouvelle stratégie du gouvernement » [2]. Face à un renouvellement des attaques de la guérilla depuis 2010 qui, selon l’observatoire Nuevo Arco Iris, tentait de retrouver une présence dans le centre du pays (dans la province du Cundinamarca), les Forces Armées ont récemment opérer un changement tactique sous la forme d’une campagne militaire du nom d’Espada de Honor (épée d’honneur). Celle-ci vise à frapper les bases arrières stratégiques de la guérilla dans diverses régions afin de l’affaiblir et « qu’elle en vienne à vouloir négocier avec le gouvernement » explique Jairo Delgado, analyste du conflit [3].

Le 14 mars 2012, l’opération Faraón tue 33 guérilleros dans la région de l’Arauca (nord du pays, frontalière au Vénézuela), et le 26 mars, l’opération Armagedón laisse à son tour 36 cadavres d’insurgés derrière elle, dans le Meta (centre du pays). Ce sont là des bombardements ciblés qui ont été entrecoupés par une embuscade des Farc dans l’Aurauca, le 17 mars, dans laquelle furent abattus 11 soldats de l’armée nationale. C’est donc l’ensemble du Bloc Oriental qui est touché pour la guérilla, l’obligeant sans doute à reculer dans le sud de la province du Meta selon Ariel Avila (membre de la corporation Nuevo Arco Iris) [4]. De quoi donner raison à Juan Carlos Pinzón, ministre de la défense, qui célèbre là « un autre succès résultant de la nouvelle stratégie des Forces Armées » [5].

Avide de nouveaux succès militaires Bogota tient à ce que ces démonstrations de force apportent des résultats concrets afin que le grand frère nord-américain lui laisse profiter de sa technologie. Le général Depsey a été clair, en ce qui concerne les drones « je veux, avant de changer mes priorités, voir si les Colombiens peuvent me convaincre qu’ils peuvent atteindre les objectifs qu’ils se sont fixés et que ces éléments peuvent réellement accélérer les choses » [6]. Outre cet échange matériel, le général a parlé d’échange de « capital intellectuel » [7]. Selon ce que rapporte les médias, notamment le site internet de Radio Caracol, le « Pentagone va envoyer en Colombie des chefs de brigades ayant obtenu de l’expérience en Irak et en Afghanistan » afin de collaborer dans la guerre contre les Farc [8]. Seul pays latino-américain a avoir participé auprès des Etats Unis dans leur guerre de Corée en 1950, la Colombie a toujours été un allié particulier de l’Oncle Sam dans sa mise sous tutelle de l’arrière-cour sud-américaine. Elle a été l’un des premier pays à bénéficier de la doctrine de sécurité nationale, impulsée par Washington, afin de neutraliser la progression des communistes dans la région durant la seconde moitié du XXème siècle. L’importation des méthodes contre-insurrectionnelles (d’inspiration française) [9] par les instructeurs US n’est pas un fait nouveau sur le continent. La traque de Che Guevara par les forces armées boliviennes formées par les rangers nord-américains revenant du Vietnam en est un des exemples les plus connus.

Le président Juan Manuel Santos est pourtant revenu sur les déclarations du général Dempsey : selon le premier mandataire colombien c’est, à l’inverse, l’armée colombienne qui a invité ses homologues nord-américains à venir s’entraîner ici [10]. Quoi qu’il en soit, il est clair que les deux nations ont décidé de renforcer leur collaboration en vue d’une intensification des attaques contre la guérilla. Toujours selon Dempsey, les colombiens « veulent accélérer leur attaques contre les Farc » avec pour objectif de réduire « de moitié » leur force militaire pour 2014 [11]. En ce qui concerne les "drones" , il semble que des sources militaires américaines aient indiqué que cela pourrait s’avérer compliqué car « le Congrès s’est opposé à partager une technologie si sensible avec d’autres pays » [12]. Le général Dempsey aurait ajouté qu’une demande déjà très élevée de ces appareils concerne des régions comme le Moyen Orient, l’Afrique mais aussi la péninsule coréenne ! [13]

Ce regain d’agressivité de la part de Bogota survient alors que la guérilla procède à la libération unilatérale des 10 derniers prisonniers de guerre qu’elle détenait. Elle a également fait savoir publiquement, dans un communiqué du 26 février, qu’elle renonçait aux enlèvements comme pratique de lutte et de financement. Pour Carlos Medina Gallego, chercheur universitaire sur le conflit armé, ces différentes décisions de la part de la guérilla sont les plus importantes depuis 10 ans. Il y voit là un moyen de « générer un rapprochement et d’esquisser des chemins pour sortir le pays de la guerre » [14]. Pour sa part, le gouvernement de Santos se félicite des coups portés aux Farc et de leur « lente agonie » [15].

Malgré les récents affrontements entre les deux parties, la guérilla n’est pas revenu sur sa promesse de libération de ses prisonniers, alors que le régime ne fait lui aucun geste en faveur des insurgés embastillés dans ses prisons ou aux Etats Unis. Sans doute en grande difficulté et incapables pour l’instant d’imposer un rapport de force en faveur de leurs revendications, les Farc ne sont pas pour autant défaites. Ces gestes en faveur d’une résolution pacifiée du conflit sont sans doute plus un signe d’une fatigue de la guerre qu’une preuve d’un affaiblissement du groupe armé (même si celui-ci est indéniable). Pour Bogota, au contraire, l’heure est à l’anéantissement par le feu d’une opposition armée qui serait aux abois. Si le régime continue de fermer toute voie à la discussion nous serons bientôt fixer sur les aptitudes des Farc à continuer la guerre.

Loïc Ramirez

 
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