RSS SyndicationTwitterFacebook
Rechercher

Pourquoi cette panique à propos de Daesh ?

Aussitôt lancé le fameux cri de guerre : "Je suis Charlie", les "zélites" politiques françaises se sont retournées, avec une certaine angoisse, vers la vacuité des effectifs de fantassins à lancer sur le terrain. Or, dans les années qui viennent, il va y avoir du sport.

Pour le vérifier, il nous suffira de revenir devant le Sénat lors de la séance qui a eu lieu le 14 janvier 2015 en présence de Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international.

Nous y écouterons, avec la plus grande attention, Aymeri de Montesquiou, qui prenait la parole au nom de l’Union des démocrates et indépendants. Gare à la panique !...

Pour ne pas se tromper, il faut aussitôt se détourner de la transcription officielle du discours, et regarder la vidéo qui subsiste de cette prise de parole mémorable, où s’étale la soudaine montée en puissance d’un État islamique qui pourrait devenir assez rapidement le pendant de l’État d’Israël, c’est-à-dire une autre façon de reprendre la question de la Palestine... de la reprendre à revers.

En réalité, dans son discours Aymeri de Montesquiou s’en tient à une argumentation qu’on pourrait dire de caractère démocrate-chrétien. Mais il est certain que son propos résonne de tout un ensemble d’échos qui n’ont rien à voir avec un État aussi peu militaire que le Vatican.

Daesh est manifestement porteur d’une très grande ambition qui va directement à l’encontre d’intérêts occidentaux au Moyen-Orient dont on pouvait penser, notamment à partir de la tentative de mise en oeuvre – aussitôt avortée – de l’Union pour la Méditerranée, que son principal point d’appui serait Israël.

Aymeri de Montesquiou constate, tout d’abord, un désastre militaire inouï : "Nous fûmes totalement pris par surprise. Comment près de 200 000 kilomètres carrés d’Irak et de Syrie ont pu être conquis en quelques semaines ? Comment Mossoul, deuxième ville d’Irak, de trois millions d’habitants, a-t-elle pu être prise en quelques heures ? D’où est issue cette force motorisée ? Comment toute cette logistique a-t-elle pu être mise en place ?"

Voilà donc la vraie conséquence des printemps arabes, mais surtout de la destruction de la Libye de Muammar Gaddhafi et de la Syrie de Bachar el-Assad...

Le Qatar, lui, n’aura pas fait le voyage pour rien...

Désastre militaire que rejoint un désastre idéologique et politique à l’intérieur même de la France. C’est encore Aymeri de Montesquiou qui en fait la constatation :
"Combien de Kouachi, de Coulibaly présents sur notre sol, équipés de Kalachnikov, d’explosifs, par des cellules dormantes, sont prêts à exécuter des policiers, des Juifs, des journalistes ? Nous n’en savons rien. On évalue à 1000 ou 1500 les djihadistes français de Daesh. Sans doute plus, selon les Kurdes qui les affrontent."

Or, "on ne peut être que très alarmés, chers collègues, par un sondage même indicatif selon lequel 25 % des 18-25 ans éprouveraient de la sympathie pour Daesh."

Et c’est alors qu’il faut commencer à se compter dans l’ensemble du Moyen-Orient :
"Quelles sont les forces au sol qui peuvent être mises en oeuvre ?"

Voyons ce qu’il reste d’un Irak démocratisé façon États-Unis :
"On a constaté à Mossoul la piètre qualité de l’armée irakienne. On ne peut compter sur les forces du Golfe et de l’Arabie saoudite peu conséquentes et de plus parce que, sunnites, elles ne se battront pas contre d’autres sunnites, aux cotés des chiites."

Voyons où en sont les fameux Anglo-Saxons :
"Les Etats-Unis ne veulent que positionner des forces spéciales, et acheminer des équipements lourds pour les peshmerga, car le président Obama craint trop l’enlisement et ne rééditera pas les erreurs commises en Afghanistan et la désastreuse campagne d’Irak. Les forces britanniques, épuisées sur ces mêmes théâtres d’opérations ne peuvent ni ne veulent envoyer des troupes au sol."

Voyons où nous en sommes nous-mêmes, au-delà de cette partie de la jeunesse qui a, d’ores et déjà, basculé, pour un quart, dans le camp d’en face :
"Les Opex [opérations extérieures] absorbent la quasi-totalité de nos forces disponibles. Et même si nous le voulions, il nous serait impossible de faire plus que l’envoi de quelques conseillers et de forces spéciales."

La conclusion est terrible...
"Pour éliminer Daesh, nous devons remettre en cause un certain nombre d’a priori, et ne pas oublier la responsabilité de ceux de notre camp qui ont contribué à sa genèse."

En effet, il n’est pas nécessaire de réfléchir longtemps pour trouver les responsables de ce désastre inouï, qui vient de se produire dans le dos des citoyennes et des citoyens français.

Car, c’est bien la France qui va devoir en payer le prix, toute seule... Elle va payer le prix de ce que Sarkozy a fait, de façon criminelle, en Libye, et le prix de ce queHollande a prétendu faire, de façon tout aussi criminelle, en Syrie, mais aussi en Iran. Elle va payer son soutien plus qu’inconditionnel, puisqu’elle l’a offert d’elle-même avant qu’on ne lui en fasse la demande motivée, à Israël et aux États-Unis.

Aymeri de Montesquiou n’y va pas par quatre chemins. L’ensemble de la politique étrangère française va devoir basculer.

NB. Tout ce qui se produit actuellement avait été annoncé par Muammar Gaddahfi, qui avait également annoncé la suite. Voir La Libye révolutionnaire dans le monde (1969-2011) deFrançoise Petitdemange, accessible notamment par ce site :
http://www.francoisepetitdemange.sitew.fr

»» http://www.micheljcunysitegeneral.sitew.fr
URL de cet article 28138
   
Roberto Saviano. Gomorra. Dans l’empire de la camorra. Gallimard, 2007.
Bernard GENSANE
Il n’est pas inutile, dans le contexte de la crise du capitalisme qui affecte les peuples aujourd’hui, de revenir sur le livre de Roberto Saviano. Napolitain lui-même, Saviano, dont on sait qu’il fait désormais l’objet d’un contrat de mort, a trouvé dans son ouvrage la bonne distance pour parler de la mafia napolitaine. Il l’observe quasiment de l’intérieur pour décrire ses méfaits (je ne reviendrai pas ici sur la violence inouïe des moeurs mafieuses, des impensables tortures corporelles, (…)
Agrandir | voir bibliographie

 

Le rôle d’un bon journaliste est de s’en prendre aux abus de pouvoir des puissants. Et lorsque cela arrive, la réaction est toujours violente.

Julian Assange

© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.