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Mobilisation : 4000 emplois en péril chez Belvédère

Belvédère représente l’exemple type d’entreprise française performante, aux carnets de commandes bien fournis, mais sacrifiées au profit d’actionnaires et de fonds de pension dont les buts sont très éloignés de toute préoccupation sociale ou économique. Car si les stratégies financières échappent au commun des mortels, c’est toujours en fin de compte les salariés qui trinquent et se retrouvent sans emploi. Un drame individuel, familial mais qui touche aussi des villes et des régions toutes entières depuis la France jusqu’à la Pologne.

Tout commence à Beaune

La société Belvédère S.A. est implantée à Beaune, au coeur de la Bourgogne, et emploie plus de 4 500 personnes dans le monde. Une entreprise de vins et spiritueux créée en 1991 et qui en quelques années est devenue la 7ème entreprise mondiale du secteur. Dans son catalogue, on peut citer les whisky Glen Roger’s, William Peel, le Pastis Berger, et surtout les vodkas Sobieski et Danska. Une vraie « succès story » comme le raconte en 2010 le quotidien Libération : « Jacques Rouvroy, ancien champion de saut à la perche et négociant en vin de Bourgogne, rencontre Christophe Trylinski, ex-international polonais de handball devenu ingénieur. Les associés ont l’idée de génie de « glamouriser » le marché encore très soviétique de la vodka polonaise. Ils mettent au point des bouteilles innovantes inspirées des flacons de parfum. » C’est la bonne idée qui lancera la PME. Le succès est fulgurant, notamment en Pologne, où Belvédère en 1996 vend près de 6 millions de bouteilles.

Cette réussite va s’étendre outre atlantique, et le quotidien La Tribune écrit alors : « la mise sur le marché de Belvédère aux Etats-Unis est un succès commercial sans précédent. La vodka Belvédère se positionne tout de suite sur le marché haut de gamme. Elle se vend plus de 30 dollars dans les magasins spécialisés. En 1995, Phillips Millenium écoule 100.000 bouteilles, puis 1,2 million de flacons en 1997. » Cette année là , la société entre en bourse. En un an, de 1997 à 1998, le cours de l’action passe de 125 à 1430 francs. En quelques années la réussite est totale pour la PME Beaunoise.

Une entreprise jalousée

Le marché des alcools blancs attire les convoitises et suscite inévitablement des manoeuvres inamicales. Les plus agressives et intéressées seront menées par les distributeurs de Belvédère sur le continent américain. Phillips Millenium Company, la société d’import en question, fait alors tout pour mettre à mal la réputation de la société française. Campagnes de dénigrement sur Internet, contrefaçons, attaques juridiques, et si un accord sera finalement signé en 2001 entre les deux parties, Belvédère n’en sort pas indemne. Malgré tout, ses dirigeants recentrent leurs activités sur la Pologne alors en pleine vague de privatisation. La PME se lance dans le rachat de plusieurs distilleries dans le pays. Une offensive qui lui permet de regagner 23% de parts de marché en créant de nouvelles marques comme Sobieski, à base de seigle, Pszeniczna et Akcyjna, à base de blé. Le marché porteur s’étend à la Russie, à la Biélorussie et à l’Ukraine. A cette époque, Belvédère S.A. réalise 92% de son chiffre d’affaires en Pologne et vend près de 30 millions de bouteilles dans le monde.

L’arrivée des fonds américains

En 2006, un fonds d’investissement américain basé à Trinidad et Tobago, entre au capital du groupe. Belvédère, en principe soutenu par ses nouveaux actionnaires, se lance dans l’achat de la marque Marie Brizard. Cet apport de nouveaux moyens aurait du permettre le développement du groupe mais ce partenariat va s’avérer un nid à problème. Des fonds spéculatifs, notamment l’anglosaxon Oaktree Capital, rachètent la créance du groupe Belvédère et tentent, par le biais d’un harcèlement judiciaire, de transformer la créance en dette immédiate. Certains journaux qualifient les arguments des avocats de ces fonds comme étant « fallacieux », et n’hésitent pas à qualifier les protagonistes de « rapaces » puisqu’il semblerait que leur triste projet soit de mettre la main sur les marques détenues par le groupe. « L’affaire Belvédère » voit le jour : des médias, des internautes et des petits porteurs de titres s’emparent du dossier et dénoncent l’absence de réaction des pouvoirs publics, tandis que les patrons de Belvédère viennent de publier une lettre ouverte à ces derniers. Une question revient sans cesse : comment expliquer que le gendarme de la bourse refuse de se prononcer sur les agissements financiers de fonds spéculatifs, suspectés par Belvédère de manipulation boursière ? De surcroît, comment est-il concevable que le tribunal de commerce décide de se prononcer sur le sort de Belvédère avant que la Cour de cassation elle-même, dans ce dossier, n’ait eu le temps de trancher sur la question du droit applicable en France ?

L’inquiétude des salariés français est palpable. Elle se répand même jusqu’aux usines de Belvédère en Pologne, où les employés ont pris l’initiative de rédiger une lettre en Français mentionnant "des signes inquiétants qui prouvent que sur le territoire français des comportements corrupteurs peuvent avoir lieu". L’incompréhension est d’autant plus grande que Belvédère devrait annoncer des résultats positifs et a encore rappelé cette semaine qu’il remplissait les engagements souscrits… Devant l’Ambassade de France à Varsovie, c’est une belle idée de la France qui vole en éclats. Sur les banderoles des manifestants qui cherchent ainsi à interpeller nos dirigeants, on peut lire : "Les spéculateurs de la banque américaine veulent nous voler la vodka Sobieski. Pourquoi la France les aide à le faire ?" (Source : France 3)

Ce combat révèle malheureusement que même des sociétés florissantes et dynamiques sont à la merci d’intérêts purement spéculatifs. Dans cette lutte, le groupe Belvédère fait face à des protagonistes sans foi ni loi, sinon la leur.

Une manifestation de salariés et de petits porteurs est prévue lundi prochain, 14 février, devant le Tribunal de commerce de Dijon où se déroulera une audience cruciale pour l’avenir de l’entreprise française.

Pour en savoir davantage sur l’affaire :
La stratégie des fonds vautours dévoilée
Enquête sur le côté obscur de la finance
Belvédère : prochain scandale économique

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