6 décembre, devant le lycée Ampère
Le caudillisme au quotidien du banquier éborgneur.
Je passe après la bataille. Une bonne cinquantaine de flics, pour beaucoup armés de LBD, ont dégagé des lycéens peu nombreux et non violents de l’entrée du Lycée. Un jeune a reçu une balle de LBD dans la joue, ce qui a nécessité son évacuation par les pompiers. Il a subi une opération de deux heures. Une jeune fille a été plaquée au sol sans raison, puis emmenée dans un car de flics où elle a été insultée et giflée avant d’être relâchée. J’ai discuté une demi heure après les faits avec un ado qui pleurait encore. On comprend la stratégie du caudillo banquier : terroriser, humilier pour que les citoyens, les jeunes en particulier, redoutent fortement d’aller manifester. Honte, naturellement, aux cognes qui mettent cela en pratique !
L’assaut des CRS a été globalement violent et a duré environ 45 minutes. Il faudra déterminer si ces charges violentes ont été sollicitées par la direction, ou non. Une cellule d’écoute a été mise en place par cette direction.
Je me suis retrouvée une demi heure plus tard à côté d’une flique qui brandissait un vaporisateur à lacrymo en rigolant avec un ou deux collègues du bon tour qu’elle avait joué à des jeunes gens âgés de quatre ou cinq ans de moins qu’elle en les aspergeant copieusement.
Un peu plus tard, je marche sur la rive gauche du Rhône quand, soudain, sur la rive droite, se font entendre des hurlements de sirènes de flics. 50 cars de police passent à toute allure sur la rive droite. 50 ! Allant je ne sais où. Dividendes et camions de CRS, le "pognon dingue" du banquier éborgneur.
J’ai raconté à mes enfants qu’il n’était pas toujours facile de manifester en mai 68. Mais :
– les matraques étaient moins dures que celles d’aujourd’hui qui vous cassent un avant-bras comme rien
– les lacrymos étaient beaucoup moins concentrées qu’aujourd’hui
– il n’y avait pas de LBD.
Seule point commun entre les deux époques : la jouissance barbare des cognes, en particulier contre des jeunes totalement inoffensifs car sans armes.
La FCPE du Lycée a publié le communiqué suivant :
"Suite aux événements de vendredi matin, la FCPE du lycée s’est positionnée et adresse un courrier aux responsables de tutelle et dénonce, ainsi que la FCPE69, ces usages violents de LBD, lacrymos etc envers des mineurs dont la plupart venaient juste en cours.
En France on a encore le droit d’exprimer ses opinions et de manifester sans risquer sa vie/sa santé, on a aussi le droit d’aller en cours en sécurité... Nous exigeons que ces droits et la liberté de choix soient garantis, et que les élèves mineurs souhaitant accéder aux établissements pour y suivre leurs cours soient protégés physiquement, moralement et psychiquement, et qu’ils ne soient pas mis en danger par ceux là même qui sont sensés assurer leur sécurité.
Les enseignants SNES -FSU ont dés ce vendredi après midi diffusé ce communiqué de presse, avec la mesure due au manque de recul aussi près de l’événement."
Les sections SNES et SUD du lycée ont publié le communiqué suivant :
"Communiqué des sections SNES-FSU et SUD du Lycée Ampère
le vendredi 6 décembre 2019
Les sections SNES-FSU et SUD du Lycée Ampère dénoncent les violences commises vendredi matin devant le lycée Ampère Saxe à l’encontre d’élèves de l’établissement. Un a reçu un tir de lanceur de balle de défense dans la mâchoire -des examens sont en cours, les dernières nouvelles seraient plutôt rassurantes sans préjuger de l’impact psychologique subi. Une autre, sans attitude menaçante, a été isolée du reste du groupe et retenue un moment pendant lequel elle a été sérieusement intimidée et même molestée par des forces de l’ordre.
En cette période de mobilisation sociale, les deux sections attendent de nos institutions (rectorat, préfecture...) qu’elles protègent l’intégrité physique des élèves et qu’elles exigent une plus grande retenue de la part des forces de l’ordre dont le rôle ne doit pas être l’intimidation des jeunes mobilisés."
Je passe de nouveau ça matin, lundi 9 décembre, devant le lycée Ampère de Lyon.
Une centaine d’élèves et d’enseignants discutent devant la porte bloquée de l’établissement.
La présence policière est légère et discrète.
C’est bien la preuve que, dans les conflits sociaux, la violence émane, 99 fois sur cent, de la police. Surtout dans un État de caudillisme.
PS : pour les lecteurs de Roland Barthes, et parce qu’il faut garder le sourire malgré tout, le punctum barthésien, c’est bien sûr le petite personnage rouge au centre de la photo d’illustration.