Nous déplorons que la France soit encore aujourd’hui et depuis longtemps lanterne rouge en Europe dans la plupart des indices de santé au travail et les besoins de prévention au travail sont immenses. Il n’est plus besoin de démontrer qu’une réforme s’attaquant aux vrais empêchements à la prévention ferait faire un bond en avant à la fois à la santé publique et à la cohésion sociale.
La réforme actuelle, rejetée par le Conseil Constitutionnel, ne touchait à aucun des déterminants de progrès bien identifiés par les professionnels de terrain impliqués. Bien au contraire, elle laissait annoncer une véritable erreur historique. Ce sujet nécessitait un grand débat public et non un passage à la sauvette, à l’ombre du grave sujet des retraites.
Alors qu’il était urgent de libérer les acteurs de santé pour qu’ils oeuvrent en toute indépendance , la mission de santé au travail était , par ce texte de réforme qui vient d’être censuré, retirée aux médecins pour être confiée aux gestionnaires employeurs , non compétents et porteurs d’un grave conflit d’intérêt, conflit d’intérêt qui a été à l’oeuvre déjà dans les dysfonctionnements des services de santé au travail et dans des instances comme le Comité Permanent Amiante, aboutissant aux drames que l’on connait.
La confusion organisée dans ces jeux d’intérêt doit être cassée : que la question de la gestion des risques qui doit être assurée par les employeurs ne soit pas amalgamée avec l’exercice de la santé au travail comme le prévoyait les articles 25 et suivants ; que, au contraire, les professionnels de santé au travail soient clairement séparés, dans leur mission et dans leur activité, de ceux qui génèrent les risques, avec de véritables garanties d’indépendance .
Le paritarisme de la gestion des services n’est certainement pas une garantie dans le contexte de défaillance de la démocratie sociale (dans les PME en particulier). Un petit pas vers l’équilibre consisterait à ce qu’il y ait dans les conseils d’administration 50% de salariés, 40% d’employeurs, 10% de professionnels.
En aucun cas les directeurs de service, nommés par le patronat, ne peuvent être garants de l’indépendance du médecin.
La mission de santé au travail doit être confiée à une équipe de professionnels coordonnée par les médecins, lesquels devraient pouvoir, en toute indépendance, mener les actions de prévention exclusivement à partir de leurs diagnostics portés sur la base de leurs constats : il ne peut pas y avoir de santé au travail si on ne fait pas de lien santé/ travail.
Perdurer dans un tel assemblage confusionnel et porteur de dégénérescence serait terriblement dangereux pour la santé des salariés, mais assurément aussi très pathogène pour ceux qui pratiquent la prévention en santé au travail.
Il est essentiel à cette phase de travail, que le dialogue avec les organisations syndicales soit ré-ouvert, pour construire une réforme au plus près des constats de terrains , une réforme qui s’attaque aux vrais empêchements à la prévention, nous le répétons, et qui permette de renforcer les effectifs , les moyens et l’indépendance de la médecine du travail, garante essentielle de son efficacité.
Le collectif des médecins du travail de Bourg en Bresse
Tél 04 74 21 88 24 ou 04 74 47 40 49
Le 26 novembre 2010