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L’Occident n’a pas inventé les cheikhs cannibales

On peut accuser l’Occident de cultiver une islamophobie passive ou de verser dans le grossier lorsqu’il s’agit de promouvoir un livre polémique, augmenter la visibilité d’un fast-think de télévision ou pour expliquer les déboires internes par les invasions barbares. Cela n’est pas faux, fait partie du jeu des relations entre peuples et de la psychologie des différences ou des signes de la peur, de l’impuissance ou de l’intolérance. Le catalogue est riche et l’Occident, malgré tout, a bon dos. Car dans le tas, si à chaque fois on se fait épingler comme étant les sauvages du moment, les Indiens de l’époque et les cannibales de la nouvelle jungle mondiale, ce n’est pas uniquement par effet de prisme ; nous y sommes aussi doués. Les caméras de l’Occident qui filment des barbus hystériques, brûlant des drapeaux ou lapidant des femmes, ne les ont payés, mais les ont trouvés. Certes, ils ne représentent pas la majorité mais illustrent le sens général quelque part et la dérive toujours possible. Aujourd’hui, on peut se raconter n’importe quelle histoire, se répéter que les Occidentaux nous en veulent « parce que nous possédons la vérité », qu’ils veulent nous voler « notre révélation », la dernière en date dans la biographie de l’humanité, et vivre comme si nous avons été spoliés d’un âge d’or légitime : cela n’empêche pas la vérité ; nous vivons cette religion parfois aussi ridiculement que certains Occidentaux la voient.

En témoigne cette affreuse sauvagerie « institutionnalisée » en Arabie Saoudite, diffusée en boucle et qui nous habille tous soit de plumes ou de pagnes, soit de sabres et de sang : un dignitaire religieux et juge suprême d’Arabie Saoudite appelant à tuer les patrons de TV, diffusant une « amour, gloire et beauté » turc, doublé en arabe et vécu par la planète d’Allah comme un assouvissement clandestin. Après avoir vu dans les émissions de variétés et de loisirs une « sédition », un Cheikh XY a estimé, rapporte l’AFP, que celui qui les diffuse « pourrait être tué, s’il n’a pas été possible de l’en empêcher ». « Il est licite de tuer (...) les apôtres de la dépravation (...) si leur mal n’est pas écarté par de simples sanctions », a-t-il ajouté. Bien sûr, le lendemain, le Cheikh reviendra atténuer, un peu, sa trouvaille cannibale, en précisant que c’est à la justice de se prononcer.

« Ce que j’ai voulu dire c’est qu’il faut présenter (l’auteur du mal) à la justice et que c’est à la justice de se prononcer en appliquant les lois en vigueur dans le royaume ».

La mise au point est tombée mais il faut dire que le festin a été consommé par les fabricants d’opinions. Bien sûr l’islamophobie est un courant commerçant en Occident, mais ce genre de Cheikh est « notre » fabrication, notre produit et l’extrême branche de notre arbre idéologique. C’est quelque chose qu’on peut ranger dans le catalogue de nos absurdités panarabes : construire les plus grandes mosquées dans les pays les plus minables, remplacer les récoltes par les prières, prier Dieu pour avoir de la pluie puis la voir couler inutilement vers la mer, croire que « l’ici-bas est pour Eux et l’au-delà pour nous », faire son Djihad en tuant un pauvre policier de la circulation, pavoiser avec sa barbe comme si elle avait aidé l’homme à marcher sur la lune, résumer le drame de sa race à un feuilleton TV... etc.

Le mal est donc fait même si un autre Cheikh a réagi pour démontrer toute la bêtise de ce genre de fatwa cannibale : « C’est un cadeau, offert sur un plateau en or, aux terroristes. Ils peuvent en profiter pour enrôler nos jeunes et les pousser à tuer et à faire exploser les stations de télévision ».

D’accord, mais arrêtons au passage de prendre l’Occident pour une félonie permanente dont le but et de traficoter « notre » livre sacré et pervertir nos femmes et nous voler notre histoire merveilleuse.

http://www.lequotidien-oran.com/?news=5109231

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