I.Les héros interdits
« Dans ce pays-ci, mets-toi ça dans la tête, tu dois courir aussi vite que tu peux pour rester à la même place »
Lewis Carroll
Alice au pays des merveilles
Vous souvenez-vous d’Elián ?
L’affaire Elián González, un garçon de six ans, retenu par la force par des inconnus contre la volonté de son père, dans un défi ouvert à la loi US et à la décence, avait été largement rapportée par les médias dans le monde entier. Miami, le lieu de la séquestration, s’était transformée en une sorte de ville sécessionniste US, lorsque le maire, le chef de la police, les politiques, tous les quotidiens et les commentateurs de radios et de télévisions, de concert avec les institutions religieuses et patronales, s’étaient unis avec certains groupes violents des plus notoires obéissant aux ordres des groupes terroristes et violents pour s’opposer à l’ordre des tribunaux et du gouvernement de libérer le garçon.
Il avait fallu envoyer une équipe des forces spéciales de Washington DC, pour lancer une opération secrète et rapide afin d’occuper plusieurs maisons, désarmer les individus qui étaient fortement armés et cachés dans le quartier, sauver le garçon et restaurer la loi. Tout le monde avait suivi l’information. Jour après jour.
Mais presque personne ne savait, qu’au même moment, exactement au même endroit - à Miami- cinq autres jeunes Cubains avaient été arbitrairement privés de leur liberté et subissaient une grande injustice.
Gerardo Hernández, Ramón Labañino, Antonio Guerrero, Fernando González et René González avaient été arrêtés très tôt le matin du samedi 12 septembre 1998, et emprisonnés pour 17 mois, seuls, dans des cellules punitives. Depuis le début de l’instruction jusqu’au jugement, le principal chef d’accusation qu’avaient retenus les procureurs et le juge, était que les cinq jeunes Cubains avaient infiltré, pacifiquement et sans armes les groupes terroristes anti-Cubains dans le but d’informer Cuba sur leurs plans criminels.
Avec ce genre d’accusation, était-il concevable que qu’un quelconque révolutionnaire cubain puisse obtenir un jugement objectif à Miami ? Cela aurait-il été possible pendant la séquestration d’Elián, dans l’ambiance de violence, de haine et de peur qui régnait ?
Pour les services du Procureur, c’était parfaitement possible. Selon ses termes, « Miami est une communauté très grande, diverse et hétérogène » capable de traiter n’importe quel sujet sensible, y compris ceux qui impliquent la révolution cubaine. C’est cette phrase que les procureurs ont répété pour rejeter plus de dix motions présentées par les avocats de la défense demandant de délocaliser le procès.
Le même gouvernement qui avait été obligé de traiter Miami comme une sorte de ville rebelle et d’envoyer secrètement des forces pour restaurer la légalité, a menti plusieurs fois sur la question du lieu du procès en refusant aux prévenus le droit que les Etasuniens respectent tant, il a rejeté la requête de délocalisation du procès vers la ville voisine de Fort Lauderdale, située à une demi-heure de Miami. Ironiquement, quelques années après, en 2002, quand le gouvernement avait été poursuivi au civil pour une affaire administratif de moindre importance, résolue par la suite par un accord hors du tribunal, et liée indirectement au cas d’Elián, le gouvernement demanda un changement de lieu vers Fort Lauderdale, en affirmant qu’à Miami, il était impossible de juger avec objectivité une quelconque affaire en relation avec Cuba (Ramàrez vs. Ashcroft, 01-4835 Civ-Huck, 25 juin 2002).
Cette contradiction flagrante, qui est la preuve claire d’un mauvais comportement du tribunal, d’un réel abus , a été l’un des facteurs principaux sur lesquels a été fondée la décision unanime de la Cour d’Appel, en 2005, pour annuler les condamnations des Cinq et décider un nouveau jugement (Court of Appeals for the Eleventh Circuit, No. 01-17176, 03-11087).
Cette décision historique fut ensuite infirmée par la majorité du tribunal sous la pression du Procureur Général (ministre fédéral de la Justice) Alberto Gonzalez dans une action contraire à ce que supposerait la pratique courante du droit aux USA. Le succès de cette manoeuvre de M. Gonzales, démonstration de sa philosophie juridique particulière, rendit impossible une résolution juste de cette affaire qui aurait honoré les USA.
La décision de la cour, un document solide de 93 pages qui décrivait des faits irréfutables de la guerre terroriste menée depuis un demi-siècle contre Cuba, reste un document extraordinaire l’histoire US et qui restera un texte que les professeurs et les étudiants en droit analyseront avec respect.
Mais ceci est un autre chapitre dans la longue saga des Cinq.
Quant à Elián González, il est sur le point d’achever son lycée et continue d’attirer l’attention des médias étrangers et des visiteurs qui se rendent à Cárdenas, le joli village dans lequel il vit. Lorsqu’ils se rendent à la maison d’Elián, ils sont surpris par des affiches qui réclament la liberté des Cinq jeunes dont les visiteurs n’avaient certainement pas entendu parler jusqu’alors.
Commentaire de Leonard Weinglass :
« Le procès a été tenu secret par les médias US. Il est inconcevable que le procès le plus long des USA jusqu’au jour de son verdict, n’ait été couvert que par la presse locale de Miami, alors que notamment des généraux, un amiral ainsi qu’un conseiller de la Maison Blanche avaient été appelés à témoigner par la défense. Où étaient alors les médias US pendant ces six mois ? Non seulement ce procès avait été le plus long, mais il traitait une affaire qui impliquait des questions importantes de politique étrangère et de terrorisme international. C’est aux médias US qu’il faut poser la question, car ils continuent à refuser de couvrir un cas dans lequel il y a eu tant de violations de droits fondamentaux, et y compris des violations des droits humains des prisonniers. » (Réponse de Leonard Weinglass, au Forum organisé par http://www.antiterroristas.cu , le 12 septembre 2003).
Ce qui a sauvé Elián c’est le fait que les Étasuniens étaient au courant de son cas et qu’ils s’étaient impliqués pour que la justice triomphe. Les Cinq sont toujours emprisonnés - cela fera 11 ans en septembre prochain - victimes d’une terrible injustice, car on ne permet pas aux Étasuniens d’en prendre connaissance. Les Cinq sont punis cruellement parce qu’ils ont combattu le terrorisme. Ils sont des héros, mais des héros interdits.
II. La justice aux Pays des merveilles
« La sentence d’abord… le verdict ensuite ! »
Lewis Caroll
Alice au pays des merveilles
Une fois écartée la question de la délocalisation du procès, le résultat du procès des Cinq était déjà prédéterminée. Il suivait strictement la prophétie de la Reine.
Les médias US ont joué un rôle très important dans deux directions. En dehors de Miami c’était un silence total ; comme l’avocat Leonard Weinglass l’a très habilement décrit, leur rôle contrastait avec celui qu’ils avaient joué dans le Comté de Dade, offrant tous deux, les médias et la cour, un show impressionnant de discipline.
Les médias locaux ne se sont pas contentés de couvrir intensivement l’affaire, mais ils y sont également intervenus, comme s’ils avaient fait partie de l’accusation. Les Cinq avaient été condamnés par les médias avant même d’être accusés.
Le samedi 12 septembre 1998, très tôt le matin, tous les médias de Miami diffusaient sans discontinuer des flashes sur la capture de « terrifiants » agents cubains, « prêts à détruire les USA » (c’était la phrase que le Procureur adorait et qu’il a répété maintes et maintes fois durant tout le procès). Ce matin-là , le titre de Une fut : « Des espions parmi nous ». Simultanément, et fort à propos, le chef du FBI à Miami rencontrait Lincoln Dàaz Balart et Ileana Ros-Lehtinen, les représentants de la vieille garde de Batista au Congrès.
Une campagne de propagande sans précédent fut lancée contre cinq individus qui ne pouvaient pas se défendre, car ils étaient totalement isolés du monde extérieur, jour et nuit, pendant un an et demi, dans ce qu’on appelle dans l’argot de la prison « le trou ».
Un cirque médiatique a entouré les Cinq depuis leur arrestation jusqu’à aujourd’hui. Mais seulement à Miami. Sur le reste du territoire des USA, c’est le silence radio sur leur dure situation. Le reste du pays n’est pas très au courant de cette affaire, et on le maintient dans l’ignorance, comme si tout le monde acceptait l’idée que Miami - cette « communauté très diverse et extrêmement hétérogène », selon la description du Procureur - appartiendrait effectivement à une autre planète.
Cela aurait pu être une proposition raisonnable, si quelques faits honteux n’avaient pas récemment été découverts. Certaines personnes des médias impliquées dans la campagne à Miami - « journalistes » et autres - avaient été payées par le gouvernement US, elles figuraient sur leurs listes de personnel en tant qu’employés dans la machine de propagande anti-cubaine à la radio et la télévision, une campagne qui a coûté plusieurs centaines de millions de dollars aux contribuables Étasuniens.
De fait, les Étasuniens se sont vus obligés d’être très généreux, sans le savoir. Il y a une longue liste de « journalistes » de Miami qui ont couvert l’intégralité du procès des Cinq, tout en recevant des chèques fédéraux bien juteux (pour en savoir plus sur le « travail » de ces « journalistes », consulter le site web http://www.freethefive.org).
En 2005, La décision de la Cour d’Appel a offert également un bon résumé de la campagne propagandiste, avant et durant le procès. C’est une des raisons pour lesquelles la Cour avait été amenée à « invalider les sentences et ordonner un nouveau jugement ». Miami n’était pas un lieu pour rendre la justice. Comme les juges l’avaient dit « les preuves présentées [devant le Tribunal de Miami] pour appuyer les requêtes de délocalisation étaient massives » (Court of Appeals for the Eleventh Circuit, No. 01-17176, 03-11087).
Clarifions un point. Nous ne parlons pas ici de journalistes, au sens où les Étasuniens en dehors de Miami peuvent l’entendre. Nous nous référons aux « journalistes » de Miami, c’est une chose très différente.
Leur rôle n’était pas de publier des informations, mais plutôt de créer un climat qui assure les condamnations. Ils ont même appelé à des manifestations publiques à l’extérieur des bureaux dans lesquels se réunissait la défense et ont harcelé les membres potentiels du jury pendant la phase précédant le procès. Le tribunal lui-même a exprimé sa préoccupation face la « quantité formidable de demandes à connaître d’avance les questions qui seraient posées aux candidats-jurés, apparemment afin d’informer les auditeurs et téléspectateurs, et parmi eux les personnes sélectionnées comme candidats, sur les questions que leur poserait le tribunal. »
Nous parlons d’un groupe d’individus qui ont harcelé les jurés, en les poursuivant dans la rue, caméra au poing, filmant leurs plaques d’immatriculation et les montrant à la télévision ; Ils les poursuivaient jusqu’à l’intérieur du Palais de Justice, jusque devant la porte de la salle des jurés, et cela durant les sept mois de procédures préliminaires du procès, du premier au dernier jour.
Plus d’une fois la juge Leonard a protesté et supplié le gouvernement d’arrêter une mascarade si déplorable. Elle l’avait réclamé du début à la fin du procès et à plusieurs occasions. Elle n’a jamais été entendue (Official transcripts of the trial, p. 22, 23, 111, 112, 625, 14644-14646).
Le gouvernement n’était pas intéressé par la tenue d’un procès juste. Au cours du processus de sélection du juré, le Procureur était avide d’exclure la majorité des membres afro-étasuniens, tout comme il avait exclu les trois individus qui n’avaient pas montré de forts sentiments anticastristes.
A cette date Elián González avait été récupéré, et il occupait toujours l’esprit des jurés. Comme le dit l’un d’eux pendant la procédure de sélection : « Je serais préoccupé par les réactions qu’il pourrait y avoir…je ne veux pas que des émeutes éclatent ou des trucs du genre de ce qui s’est passé dans l’affaire Elián ». Ou bien un autre, je cite : « Pour vous dire la vérité…je deviendrais une vrai loque nerveuse, j’aurais peur pour ma propre sécurité si je ne revenais pas avec un verdict favorable à la communauté cubaine [de Miami] ».
C’est dans cette atmosphère de peur qu’avait débuté le plus long procès à ce jour dans l’histoire des USA, ce procès que les grands médias avaient « choisi » d’ignorer.
III. Le visage de l’impunité
Comme ils l’ont reconnu au cours des entrevues pour la sélection du jury, le kidnapping d’Elián González et ses conséquences pour la communauté de Miami étaient très présentes dans les esprits des jurés choisis pour composer le jury, dans le procès des Cinq Cubains. Un procès qui a eu lieu seulement quelques mois après que le garçon de six ans eut été libéré par la police fédérale.
Comme toute la communauté, les jurés avaient suivi les événements liés à l’affaire Elián. Des événements qui avaient saturé les informations. Les portraits des kidnappeurs, de leurs sponsors et partisans, ainsi que les visages d’autres personnes impliquées dans le scandale étaient dès lors bien connus par les membres du jury. Les portraits, ainsi que deux détails uniques du drame d’Elián et en connexion directe avec le procès des Cinq Cubains.
Premièrement, la conduite déconcertante de tous les fonctionnaires publics de Miami, de leurs membres du Congrès, le maire et les élus locaux jusqu’aux pompiers et aux membres de la police, qui ouvertement, ont refusé d’obéir à la loi et n’ont rien fait pour mettre fin à la plus grande affaire d’abus de mineur aussi médiatisée qui se soit jamais produite. Et, deuxièmement, chose encore plus incroyable, c’est qu’aucune poursuite n’avait été engagée contre le groupe d’individus qui avait violé la loi aussi clairement en kidnappant un enfant et en créant de la violence et les troubles dans toute la ville lorsque le gouvernement fédéral était venu le libérer. Personne n’a été jugé, ni arrêté, ni sanctionné. Aucune autorité locale n’a été destituée, ni remplacée, ni invitée à démissionner. Le cas Elián a démontré de quelle manière l’impunité anticastriste règne à Miami.
Quand les membres du jury se sont assis la première fois dans la salle du tribunal pour effectuer leur devoir de citoyens, ils ont du être probablement étonnés. Ils avaient, là , devant eux, les « célébrités de Miami » qu’ils avaient l’habitude de voir, jour et nuit, à la télévision locale. Et ils étaient tous ensemble, parfois ils souriaient et s’embrassaient, comme de vieux acolytes. Les kidnappeurs et les personnes chargées de « faire appliquer la loi » en connivence avec les procureurs (ces personnes courageux qui jamais ne sont apparus lorsqu’un petit garçon était molesté par les médias).
Les membres du jury ont passé sept mois dans cette enceinte en voyant, et en étant observés par ces personnes mêmes qui leur étaient si familières et qui maintenant se trouvaient sur le banc des témoins, au milieu de la zone réservée au public ou sur les bancs de la presse. Ces mêmes personnes qu’aujourd’hui ils rencontraient si souvent au parking, à l’entrée du palais du tribunal et dans les couloirs. Certains arboraient quelquefois, orgueilleusement, la tenue portée au cours de leur dernière incursion militaire à Cuba.
Les membres du jury les ont écoutés expliquer en détail leurs exploits criminels et en répéter plusieurs fois qu’ils ne parlaient pas du passé. Ca a été un étrange défilé d’individus qui comparaissaient devant Cour pénale, en reconnaissant leurs actions violentes contre Cuba. Des actions qu’ils avaient planifiées, préparées et entreprises à partir leur propre quartier.
Ils étaient là , à faire des discours, en exigeant la sanction la plus dure, en diffamant et en menaçant les avocats de la défense.
La juge avait fait ce qu’elle avait pu pour essayer de préserver le calme et la dignité. Elle avait réellement ordonné, plusieurs fois, au jury de ne pas tenir compte de certains commentaires inappropriés, mais ce n’était pas suffisant pour effacer de l’esprit du jury les conséquences préjudiciables et terrorisantes de ces déclarations.
Les conséquences étaient évidentes. La décision du jury de la Cour d’Appel l’avait exposé en termes très clairs : « les preuves son apparues de la véracité des activités clandestines non seulement des accusés, mais également celles de plusieurs groupes d’exilés cubains et des camps paramilitaires qui continuaient à opérer dans le secteur de Miami… La perception que ces groupes pouvaient faire du mal aux membres du jury qui émettraient un verdict défavorable à leurs points de vue, était palpable ». (Onzième Circuit de la Cour d’Appel, N°01-17176, 03-11087)
Mais ce n’était pas tout. Après avoir vu et entendu les preuves abondantes des actes de terrorisme que les accusés avaient essayé d’empêcher, le gouvernement est parvenu à défendre les terroristes en convainquant le tribunal d’ôter au jury la prise en compte de la défense de l’état de nécessité, qui rendait possible d’excuser les Cinq ; cet état de nécessité étant la base légale de leur défense.
Dans ce cas, le fond du problème est que Cuba a la nécessité de protéger son peuple des tentatives criminelles des terroristes qui jouissent d’une totale impunité en territoire US. La loi étasunienne est claire : si on agit pour prévoir des dangers majeurs, même si on le fait en violant la loi, on sera exempté de toute pénalité, car la société reconnaît la nécessité, y compris les avantages, d’exécuter cette action.
Les USA, seule superpuissance mondiale, ont interprété ce principe universel pour justifier la légalité des guerres sur des terres éloignées au nom de la lutte contre le terrorisme. Toutefois, ils ont refusé de le reconnaître pour cinq hommes désarmés, pacifiques, non violents qui, au nom d’un petit pays, sans causer de préjudice à personne, ont essayé d’empêcher les actions illégales de certains criminels qui jouissent d’asile et de soutien aux USA…
Par le truchement des magistrats de Miami, le gouvernement US est allé encore plus loin, au-delà même du concevable, pour aider les terroristes. Ils l’ont fait très ouvertement, par écrit et avec des discours passionnés qui curieusement n’ont jamais été considérés comme présentant un intérêt journalistique.
Cela s’est passé en 2001. Quand les magistrats du Sud de la Floride et le bureau local du FBI étaient très occupés à punir durement les Cinq Cubains tout en offrant la protection « à leurs » terroristes, les criminels qui commirent l’attaque du 11 septembre, s’entraînaient, sans être dérangés, et depuis fort longtemps, à Miami. Ils devaient avoir une bonne raison pour préférer ce lieu.
IV. Avec leurs propres mots…
La mise en incapacité des Cinq Cubains
Les périodes d’emprisonnement disproportionnées infligées aux Cinq - Gerardo Hernández Nordelo (deux condamnations à perpétuité plus 15 ans), Ramón Labañino Salazar (une condamnation à perpétuité plus 18 ans), Antonio Guerrero Rodràguez (une condamnation à perpétuité plus 10 ans), Fernando González Llort (19 ans), et René González Seheweret (15 ans) - contrastent grandement avec celles qui ont été appliquées durant ces dernières années aux USA à d’autres personnes accusées d’exercer réellement de l’espionnage, certains à des échelles inhabituelles, et dans d’autres cas, ceux impliqués dans des actions armées violentes contre les USA. Aucun d’eux n’a jamais été condamné à perpétuité ; tous ont reçu des peines inférieures à celles des Cinq. Certains, ont même déjà accompli leurs condamnations et sont en liberté, et d’autres, qui étaient condamnés pour espionnage, ont été graciés et libérés par l’administration d’Obama.
Les condamnations excessives des Cinq sont une preuve de la motivation politique vindicative du jugement, de même que le sont les conditions de leur emprisonnement, y compris les obstacles très sévères dressés pour les visites familiales, atteignant l’extrême de refuser toujours les visas aux épouses de René et de Gerardo.
Toutefois, il y a un aspect encore plus révélateur qui démontre que l’intention du gouvernement US était de mettre à l’abri et protéger les terroristes anti-cubains, pour éviter que leurs plans sinistres ne soient découverts, et devenir les complices et les façades pour de futures atrocités.
Pour l’administration Bush, ceci était aussi important sinon plus, que les incompréhensibles années d’emprisonnement. C’est ce que le procureur avait dit de manière véhémente et en termes explicites, lorsqu’il avait demandé au Tribunal une peine additionnelle de : « mise en incapacité ». [Peine qui prive le condamné à certains droits]
Qu’est-ce que ça signifie ? De l’avis du gouvernement, il était essentiel d’assurer que ces cinq individus, après avoir accompli leurs peines de prison, ne pourraient plus jamais faire quoi que ce soit qui pourrait gêner les activités des terroristes qui opèrent à Miami sous la protection du gouvernement US. Pour s’en assurer, la Cour a demandé, et le tribunal a garanti, des mesures spéciales pour chaque sentence, en s’assurant qu’après avoir accompli leurs peines de prison, y compris une ou plusieurs condamnations à perpétuité, les accusés soient dans l’impossibilité d’essayer de faire ce pourquoi ils sont en prison.
Gerardo, Ramón et Fernando sont nés à Cuba, une fois qu’ils auront accompli leurs peines de prison, ils seront déportés immédiatement du territoire US en tant qu’étrangers indésirables. Cela a été spécifié dans chacune de leurs sentences, y compris dans celle de Gerardo, qui au bout de 15 ans de prison de sa seconde peine de prison à vie serait immédiatement déporté. (Transcription de l’Audience pour les Sentences devant l’honorable Joan A. Lenard, 12 décembre 2001, page 93).
René et Antonio présentent un problème plus particulier. Ils sont nés respectivement à Chicago et en Floride, tous les deux sont citoyens américains de naissance, et ils ne peuvent pas les obliger à abandonner le pays. Pour ces deux cas, il a fallu aux procureurs recourir à davantage d’imagination et de rhétoriique imaginative. Ils ont su faire preuve de l’une et de l’autre
Ils avaient besoin d’une explication plus franche et plus précise de l’expression « mise en incapacité ».
Ils ont dû d’abord argumenter sur le cas de René, condamné « seulement » à 15 ans de prison. La Cour a pleinement exprimé sa grave préoccupation qu’un homme encore si jeune, puisse être libéré et essayer de refaire ce qu’il avait fait avant.
Connaissant l’angoisse du gouvernement, le tribunal a ajouté cette condition particulière à la sentence de René :
« Comme condition spéciale additionnelle à la libération conditionnelle, il est interdit à l’accusé de s’affilier ou de visiter des lieux spécifiques qui sont connus pour être fréquentés par des individus ou des groupes tels des terroristes, membres d’organisations qui incitent à la violence, et des parrains du crime organisé. » (Transcription de l’Audience pour les Sentences devant l’honorable Joan A. Leonard, 12 décembre 2001, pages 45-46).
Puis ce fut au tour d’Antonio Guerrero, qui avait été condamné à perpétuité plus 10 ans de prison. La Cour a dû faire valoir toutes les ressources de son éloquence. Pour le gouvernement la « mise en incapacité » était d’une importance vitale. Il ne pouvait pas prendre de risques, et lorsque le 27 décembre 2001 Antonio Guerrero fut devant le Tribunal, celui-ci ajouta, mot pour mot, à sa sentence, la même « condition spéciale » que celle qu’il avait auparavant imposée à René.
Tout ceci s’est déroulé en décembre 2001, juste 3 mois après l’horreur du 11 septembre. Depuis ce jour fatidique, George W. Bush s’est rendu célèbre en exigeant une guerre massive contre les terroristes et contre ceux qui les aideraient d’une quelconque façon. Prenons seulement une citation parmi ses nombreuses paroles rébarbatives : « Tout gouvernement qui soutient, protège ou accueille des terroristes, sera complice des meurtres d’innocents, il sera également lui-même coupable de crimes terroristes ».
Prenons-le au mot.
En octobre 2011 René González aura fini de purger sa peine si la défense ne parvient pas à le faire libérer avant. En tout cas, il sera en liberté conditionnelle sous la mandature de l’administration actuelle. Est-ce que le président Obama tentera de le « mettre en incapacité » ? Interdira-t-on à René de faire quoi que ce soit qui puisse gêner les terroristes "là où ils sont ou fréquentent" ?
V. Des espions sans espionnage
En septembre 1998, le premier procès verbal d’accusation, incriminait les Cinq Cubains d’être des agents non enregistrés de Cuba et d’autres infractions mineures. Le gouvernement a également accusé trois d’entre eux - Gerardo, Ramón et Antonio- « de conspiration d’espionnage » (Charge 2).
La Cour n’a accusé aucun d’eux d’espionnage en tant que tel pour une raison très simple : rien de tel n’a existé et par conséquent une telle accusation ne pourrait jamais être prouvée. Les magistrats sont allés encore plus loin. Dans leur déclaration initiale ils ont averti le jury de ne pas espérer qu’ils révèlent un quelconque secret ni rien de ce style. La seule chose que devait faire la Cour était de « convaincre » les membres du jury que les accusés étaient des personnes vraiment dangereuses capables de fomenter une tentative de mettre en danger la sécurité nationale des USA à n’importe quel moment dans un futur imprévu. Ils ont également fait valoir, que les accusés devaient recevoir la peine la plus sévère possible, car ils étaient des types vraiment mauvais qui perturbaient la paix et la tranquillité de Miami. Vous rappelez-vous d’Elián ?
Pour atteindre ce but, malgré le contenu de leurs propres accusations, les magistrats ont fait, au cours du procès, des déclarations très violentes, accusant les Cinq cubains d’agir rien de moins que pour « détruire les USA » et en rappelant aux membres effrayés du jury que s’ils ne les condamnaient pas ils « trahiraient la communauté ».
Les médias se sont chargés du reste. Ils ont toujours décrits les Cinq Cubains comme étant des « espions », ou comme des personnes accusées d’être des « espions ». Les médias se sont réellement surpassés dans leur tâche. Ils n’ont cessé de rabâcher la même chanson, même après que la Cour d’Appel en banc ait conclu unanimement en septembre 2008 qu’il n’y avait pas de preuve que les accusés aient « obtenu ou aient transmis d’information secrète » ou qu’ils aient mis en danger la sécurité nationale des USA et par conséquent elle avait décidé que les sentences pour la Charge 2 (conspiration d’espionnage) étaient erronées, elle les avait annulées et avait décrété que Ramón et Antonio devaient être rejugés. (Onzième Circuit de la Cour d’Appel, 01-17176, DC, Docket Non 98-00721-CR-JAL, pages 70-81).
Cependant, malgré que les magistrats avaient reconnu que la même procédure devait s’appliquer à Gerardo, le tribunal a refusé de l’appliquer, par un incroyable acte de discrimination judiciaire, arguant qu’une condamnation à perpétuité pesait déjà à son encontre.
De fait, il était très facile de se rendre compte que dans ce cas, aucune information secrète ou militaire n’était impliquée, et que la sécurité nationale des USA n’a jamais été inquiétée. C’était ce que le Pentagone avait dit clairement et simplement avant que ne débute le jugement. Ce fut le témoignage, sous serment, de l’amiral à la retraite Eugene Carroll (transcriptions officielles, pages 8196-8301), du général de l’Armée à la retraite Edward Breed Atkeson (Idem pages 11049-11199), du général et ex commandant du Commando Sud Charles Elliot Wilhelm (Idem pages 11491-11547), et du lieutenant général à la retraite de la Force Aérienne James R. Clapper (Idem pages 13089-13235).
Leurs témoignages n’étaient pas secrets, mais volontairement prononcés en audience publique. Probablement qu’un défilé comme celui-là , de chefs militaires distingués et décorés soutenant l’innocence de certains jeunes révolutionnaires cubains, ne s’était jamais produit avant devant un tribunal des USA. Ces informations ne sont jamais sorties en dehors de Miami, mais les transcriptions officielles du jugement sont là pour celui qui veut les lire.
Depuis que les Cinq Cubains ont été condamnés, d’autres affaires ont eu lieu, leurs résultats contrastent clairement avec ceux des Cinq Cubains. Nous allons en examiner brièvement quelques-uns.
Khaled Abdel-Latif Dumeisi, convaincu d’être un agent non enregistré du gouvernement de Saddam Hussein. Il a été condamné à 3 ans et 10 mois de prison en avril 2004, en pleine guerre des USA contre l’Irak.
Leandro Aragoncillo a été reconnu coupable, en juillet 2007, d’avoir transmis des informations secrètes de défense nationale des USA (environ 800 documents classés) obtenus depuis son bureau à la Maison Blanche, où il travaillait comme collaborateur militaire des vice-présidents Al Gore et Dick Cheney. M. Aragoncillo a été condamné à 10 ans de prison, tandis que son co-conspirateur, Michael Ray Aquino, a été condamné à 6 ans et 4 mois.
Gregg W. Bergersen, un analyste du Département de la Défense, a été reconnu coupable, en juillet 2008, d’avoir fourni des informations de défense nationale à des personnes non autorisées en échange d’argent et de cadeaux, et il fut condamné à 4 ans et 9 mois de prison.
Lawrence Anthony Franklin, un colonel de réserve de la Force Aérienne des USA, qui travaillait au Département de la Défense, a été condamné pour avoir livré des informations classées et de défense nationale, y compris des secrets militaires, à des représentants d’un gouvernement étranger. Il a été condamné à 12 ans et 7 mois de prison. Toutefois, il n’est jamais entré dans une prison fédérale. Il est resté en liberté durant la période où il avait appel et en mai dernier le Département de la Justice a retiré les charges contre son cas.
Il est inutile de dire qu’aucun des cas précédemment mentionnés a été jugé dans le sud de la Floride, ni impliqué dans aucune tentative de faire échouer des plans criminels.
Les Cinq ont reçu, ensemble, quatre peines à perpétuité plus 77 ans. Eux ne travaillaient pas à la Maison Blanche, ni au Pentagone, ni au Département d’État. Ils n’ont jamais pu ni essayé d’accéder à une quelconque information secrète. Mais ils ont fait quelque chose d’impardonnable. Ils ont combattu le terrorisme anti-cubain et ils l’ont fait à Miami.
VI. Accusation à la carte
Plus de sept mois après l’arrestation et l’inculpation des Cinq Cubains, le gouvernement US a présenté une nouvelle accusation. Il s’agissait toujours de « conspiration », mais cette fois-ci dans l’intention de commettre un homicide au premier degré, et elle visait spécialement l’un des Cinq, Gerardo Hernández Nordelo.
La nouvelle accusation a été lancée suite à une campagne publicitaire à Miami, impulsée activement par des « journalistes » à la solde du gouvernement US, faisant notamment état de réunions publiques entre des leaders de l’exil cubain, des magistrats, et des fonctionnaires du FBI. Réunions au cours desquelles ils discutaient ouvertement sur l’accusation contre Gerardo. Cela devint une exigence claire des groupes les plus violents de la ville, et les médias locaux en ont fait leur cheval de bataille quotidien.
Le gouvernement ayant accédé à cette exigence avait présenté formellement la nouvelle accusation qui ajoutait un nouvel élément essentiel aux « crimes » de Gerardo.
C’était donc une concession politique aux terroristes anti-cubains, qui cherchaient à se venger de la destruction de deux avions (modèle O2 utilisés par la Force Aérienne US d’abord au Vietnam et plus tard dans les guerres au Salvador) par la Force Aérienne cubaine le 24 février 1996. Les avions utilisés par des membres d’un groupe violent anticastriste [Les Frères du secours] avaient été abattus dans l’espace aérien cubain deux ans avant que les Cinq soient arrêtés.
Le timing était très suspect. Selon l’information divulguée par le ministère public pendant le procès, le FBI avait découvert la véritable nature de la mission révolutionnaire de Gerardo à Miami et il était déjà sous surveillance par l’interception de ses communications avec La Havane deux ans au moins avant la destruction des avions. Si cet incident a été le résultat d’une « conspiration », dans laquelle Gerardo était un acteur clé, pourquoi ne l’ont-ils pas arrêté en 1996 ? Pourquoi cette affaire n’a-t-elle même pas été mentionnée en septembre 1998 quand ils ont arrêté et inculpé Gerardo ?
Les avions appartenaient à un groupe dirigé par José Basulto, un agent vétéran de la CIA impliqué depuis 1959 dans une multitude d’actions de paramilitaires, y compris dans celle de l’invasion de Playa Girón et d’une série de tentatives d’assassinat contre Fidel Castro. Durant les 20 mois précédant l’incident, ce groupe avait pénétré l’espace aérien cubain 25 fois, et chaque fois le gouvernement cubain l’avait dénoncé.
Après tant de démarches diplomatiques, le gouvernement US voulait faire preuve de réactivité. Il a ouvert une enquête sur les vols, et demandé l’aide de Cuba pour obtenir des détails sur les provocations antérieures, accusant réception et remerciant pour les avoir reçus. A la date du 24 février 1996, alors que les procédures administratives étaient encore en cours, l’Administration Fédérale de l’Aviation (FAA) avait déjà privé Basulto de sa licence de pilote et depuis, il ne vole plus (du moins pas légalement).
Les provocateurs avaient proclamé ouvertement qu’ils continueraient à violer l’espace aérien de Cuba, déclarant même, qu’à cette époque, l’île souffrait de sa crise la plus dure - pire en termes économiques, que la Grande Dépression, selon un rapport des Nations-Unies - et qu’elle était incapable de répondre à leurs incursions illégales.
En janvier, le M. Basulto avait emmené en avion une équipe de la télévision NBC de Miami, qui avait filmé et diffusé un survol du centre de La Havane accompagné de lancers de tracts de propagande et d’autres matériels. Cuba avait déclaré alors publiquement qu’elle ne tolérerait plus de telles provocations, et avait rédigé les notifications nécessaires à toutes les parties intéressées, y compris au gouvernement US, au Département d’État et la FAA, qui à son tour avait averti Basulto et son groupe de s’abstenir de ces vols.
La supposée « conspiration » était en elle-même une stupidité monumentale, incompréhensible pour tout esprit rationnel. On supposait que le gouvernement cubain avait décidé de provoquer une guerre totale contre les USA, un affrontement militaire qui, évidemment, aurait débouché sur un désastre terrible non seulement pour le gouvernement cubain, mais pour toute la nation et son peuple. Pour n’’importe quel crime ou délit, le mobile est toujours un facteur clé. Décisif. Quel aurait pu être le mobile de Cuba, pour provoquer un événement précisément en cette période de 1996, la plus dangereuse pour la survie de notre pays sans allié ou ami dans un monde et un hémisphhère sous contrôle total des USA ?
Cuba a fait exactement le contraire. Elle a dénoncé l’une après l’autre, chaque provocation à la FAA et à l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (OACI, Institution de la famille des Nations-Unies qui s’occupe de ces questions) et a envoyé des dizaines de courriers diplomatiques au Département d’État. Mais Cuba est allée plus loin. Elle a fait tout ce qui était possible pour parvenir au plus haut niveau de l’administration US, la Maison Blanche, pour tenter de prévenir de nouveaux incidents.
The New Yorker, dans son édition de janvier 1998 consacrée à Cuba à l’occasion de la visite du Pape, a publié un article sérieux avec un récit assez objectif de ces efforts cubains (Carl Naguin, "Annals of Diplomacy Backfire" , The New Yorker, 26 janvier 1998.)
Oui, il y a bien eu une conspiration pour provoquer la tragédie du 24 février 1996. Mais ce fut exclusivement et intégralement l’oeuvre de ces mêmes groupes qui à Miami ont lancé une campagne terroriste contre Cuba depuis un demi-siècle. La même bande qui avait auparavant kidnappé le petit Elián González, âgé de six ans. Des actes toujours commis en toute impunité.
VII. Ca s’est passé à Miami
Le tribunal fédéral de première instance du District sud de la Floride n’est pas un tribunal international, ni un organisme de l’ONU ayant compétence sur les questions qui concernent les relations entre les nations. Il a une tâche bien spécifique, qui consiste à déterminer si un accusé particulier est coupable ou non d’une charge concrète. En instruisant le jury dans le cas de Gerardo Hernández, la Cour rappelait les paroles de l’acte d’accusation du gouvernement :
« La 3ème charge de l’acte d’accusation soutient que l’accusé Gerardo Hernández a comploté avec d’autres personnes pour commettre un homicide, c’est-à -dire, un meurtre illégal d’êtres humains avec malveillance intentionnelle et intention préméditée dans la juridiction maritime et territoriale spéciale des USA. » (Transcription du jugement devant l’honorable Joan. à Lenard, 4 juin 2001, pages 14587 à 14588)
La juge Lenard indiqua que Gerardo :
« Peut être reconnu coupable de cette infraction seulement si tous les faits suivants sont prouvés sans l’ombre d’un doute raisonnable :
« Premièrement : Que les victimes mentionnées dans l’acte d’accusation sont mortes.
« Deuxièmement : Que l’accusé a causé la mort des victimes avec malveillance intentionnelle.
« Troisièmement : Que l’accusé l’a fait avec intention préméditée.
« Quatrièmement : Que le meurtre s’est produit dans la juridiction maritime et territoriale spéciale des USA. » (Idem pages 14598 à 14599)
De plus elle expliquait :
« Que tuer avec malveillance intentionnelle signifie tuer délibérément et intentionnellement une personne… Pour établir un crime de meurtre au premier degré, il est en outre nécessaire d’avoir la preuve d’une intention préméditée. La préméditation est en général associée à un meurtre de sang-froid et requiert un certain temps pendant lequel l’accusé pense ou réfléchit sur l’acte avant d’agir. La période de réflexion doit être suffisamment conséquente pour que l’assassin ait pleinement conscience de son intention de tuer. Vous êtes informé que le lieu du crime allégué (comme décrit dans l’acte d’accusation) doit avoir été, avec certitude et sans aucun doute raisonnable de votre part, situé dans la juridiction maritime et territoriale spécial des USA. » (Idem pages 14599 - 14600)
Un tel crime n’a jamais eu lieu. Pendant les sept mois du procès, les procureurs n’ont présenté aucune preuve susceptible d’impliquer Gerardo dans l’événement tragique du 24 février 1996, de même qu’ils ne pouvaient pas démontrer, « au-delà d’un doute raisonnable », le lieu précis de l’incident - une chose que les experts du Bureau de l’Aéronautique Civile Internationale (OACI) n’avaient pas pu déterminer.
Toutefois, il convient d’indiquer, que les radars cubains ont clairement démontré que les avions ont bien été abattus à l’intérieur de notre territoire, que les uniques débris qui ont été retrouvés l’ont été très près de La Havane et que les garde-côtes US, n’ayant rien trouvé dans le secteur international, ont officiellement demandé le 25 février par le biais du Département d’État, l’autorisation à Cuba de réaliser une recherche dans le secteur de nos eaux territoriales. Les médias locaux - ces mêmes « journalistes » à la solde du gouvernement qui avaient inventé la troisième accusation - sont devenus nerveux et sont allés jusqu’à annoncer une défaite imminente.
Quelques jours auparavant, lorsque la juge avait informé les parties de ses instructions au jury, les procureurs ont adopté ce qu’eux-mêmes avaient décrit comme « l’étape sans précédent de la pétition » - à la Cour d’appel - pour « un défense de statuer » car « en tenant compte des preuves présentées pendant le procès, cela [les instructions au jury] constitue dans ce cas un obstacle insurmontable pour l’accusation, et aurait probablement pour conséquence d’entraîner l’échec de l’acte d’accusation sur cette charge. » (Emergency Petition for Writ of Prohibition, 30 mai 2001, pages 4 et 21)
Après avoir de nouveau reconnu que l’instruction au jury « impose une barrière insurmontable », le ministère public a demandé à la Cour d’Appel de prendre une décision urgente :
« Que le tribunal de première instance (du District de Miami) donne l’instruction au jury - dans la troisième charge de l’acte d’accusation - qu’il n’est pas nécessaire qu’il conclue que l’accusé Hernández ou ses co-conspirateurs aient convenu que les meurtres se produiraient dans la juridiction maritime et territoriale spéciale des USA. »
« Qu’elle interdise au tribunal de première instance de donner au jury un instruction de statuer sur un meurtre au premier degré et de l’orienter sur a thèse que l’accusé Hernández ait comploté pour commettre un meurtre prémédité. » (Idem, page 39)
La Cour d’Appel avait rejeté la requête de défense de statuer et en conséquence la juge avait maintenu ses instructions citées précédemment.
Quelques membres de la défense commençaient déjà à fêter une victoire que même les procureurs avaient prévue.
Mais cela ne prit que quelques minutes aux jurés pour, sans même poser de questions, pour déclarer Gerardo coupable de conspiration en vue de commettre un meurtre au premier degré dans la juridiction maritime et territoriale spéciale des USA. Un « crime » qu’il n’a pas commis, et que les procureurs eux-mêmes avaient désespérément tenté de retirer.
Ca c’est passé à Miami. A Miami il est normal de kidnapper impunément un enfant de six ans, alors pourquoi serait-il si difficile de condamner un jeune homme pour un « crime » qui n’a pas eu lieu ?
Ricardo ALARCà“N DE QUESADA
Source : Counterpunch - Forbidden Heroes & Justice in Wonderland & The Face of Impunity
Articles originaux publiés les 11,12 et 25/8/2009 :
Forbidden Heroes :
http://www.counterpunch.org/alarcon08112009.html
Justice in Wonderland :
http://www.counterpunch.org/alarcon08122009.html
The Face of Impunity :
http://www.counterpunch.org/alarcon08252009.html
In Their Own Words :
http://www.counterpunch.org/alarcon08272009.html
Spies Without Espionage :
http://www.counterpunch.org/alarcon08282009.html
Indictment A La Carte :
http://www.counterpunch.org/alarcon09032009.html
It Happened in Miami :
http://www.counterpunch.org/alarcon09042009.html
Traduit par Esteban G.. Édité par Fausto Giudice
Esteban G. est rédacteur du blog http://letacle.canalblog.com/, Fausto Giudice est rédacteur du blog Basta ! Journal de marche zapatiste. Tous deux sont membres de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique. Cette traduction est libre de reproduction, à condition d’en respecter l’intégrité et d’en mentionner l’auteur, le traducteur, le réviseur et la source.
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