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Et maintenant, le tour de (la) France ?

Donc on peut s’en aller. C’est la leçon essentielle qui découle du référendum britannique. En dépit de l’incroyable brouhaha politico-médiatique et de l’extraordinaire confusion que les mauvais perdants ont tenté de semer.

Car on aura tout entendu, du plus classiquement éculé au plus audacieusement grotesque : les Britanniques ont voté par « inadvertance », dans un « moment d’égarement » ; ils voulaient juste donner un avertissement au Premier ministre ; ils regrettent déjà leur vote ; du reste, un référendum devrait n’être valable qu’avec 60% de votes positifs ; avoir lancé consultation populaire est « irresponsable », voire « criminel ». Par ailleurs, le divorce d’avec l’UE est « matériellement impossible » ; en outre, le parlement peut encore défaire ce que les citoyens ont tranché ; et finalement, la procédure de divorce pourrait bien ne jamais être enclenchée...

L’Europe a une longue expérience en matière d’inversion des verdicts populaires. Mais cette fois, il va falloir que ceux qui prennent leurs désirs pour des réalités s’y fassent : la sortie aura lieu. Ni le levier écossais (aléatoire et lointain), ni la (malheureusement réelle) désinvolture des Tories pro-Brexit (mais qui n’avaient nullement le monopole de la campagne anti-UE) n’y changeront rien.

L’événement est de même magnitude que la chute du Mur de Berlin. Mais là où cette dernière avait enclenché l’extension de la domination occidentale, antisociale et belliqueuse, sur le monde, le choix du peuple britannique sape les fondements d’un des piliers majeurs de cette hégémonie. La « contagion » constitue dès lors la grande terreur des dirigeants européens. Comme s’en désespère l’ultra-fédéraliste Guy Verhofstadt : « ce n’est qu’une question de temps avant qu’on voie d’autres pays se lancer dans des demandes similaires ».

Les maillons faibles sont déjà connus (mais n’excluent pas des surprises) : le Danemark et les Pays-Bas, mais aussi l’Italie... Et bientôt le tour de la France ? Dès 2004 – date de la signature de feu le traité constitutionnel, suivie quelques jours plus tard d’une gifle monumentale manifestée par l’abstention massive aux élections européennes – les premières fissures sont apparues. Les Non français et néerlandais de 2005 ont provoqué de profondes lézardes. Le Brexit creuse une brèche si béante que la digue ne peut désormais plus être réparée.

Certains seconds couteaux vendent la mèche, tel Alain Lamassoure qui plaide « pour un divorce très couteux et très douloureux pour le Royaume-Uni » (avis aux volontaires suivants), ou bien l’ancienne présidente de l’europarlement Nicole Fontaine, qui se réjouit déjà : « quand on va constater les conséquences économiques qui vont frapper la Grande-Bretagne, ça peut calmer les pays tentés par cette contagion ».

Au fond, l’UE ressemble furieusement à une secte : si un membre veut quitter l’organisation pour retrouver sa liberté, on le harcèle, on le dénigre, on le menace des pires conséquences – bref, on s’efforce de lui pourrir la vie ; pour le punir, mais aussi et surtout pour tétaniser ceux qui seraient tentés de le suivre.

Les coups tordus et les obstacles ne manqueront donc pas, ce qui laisse ouverts les formes et le délai de la sortie du Royaume-Uni. Mais pas sa survenance. Notamment parce que le vote populaire a eu pour facteur essentiel « la rébellion des dominés contre les dominants et des laissés-pour-compte contre les décideurs » selon les termes du présentateur vedette de la BBC Andrew Marr. De fait, c’est bien dans les villes ouvrières et les régions désindustrialisées (en Angleterre du Nord, en particulier) que la victoire a été assurée.

Les quolibets haineux qui fusent contre ces « milieux défavorisés » dotés d’« un niveau d’éducation inférieur », « irrationnels et mus par la haine » témoignent jusqu’à la caricature d’un mépris de classe rehaussé par la hargne de la défaite, qui s’est illustré en particulier parmi les milliers de manifestants londoniens – jeunes « citoyens du monde » des bobos quartiers auxquels se mêlaient des expatriés – qui ont réclamé l’annulation du vote exprimé par plus de 17 millions d’électeurs, s’appuyant sur une pétition en ligne ouverte à la signature de la planète entière...

Tout cela sera vain. Car un spectre hante l’Europe, qui a été formidablement résumé par le président allemand Joachim Gauck trois jours avant le scrutin, dans un mélange de lucidité et d’effroi : « les élites ne sont pas le problème, ce sont les peuples qui sont pour le moment le problème ».

Tout est dit.

Éditorial paru dans l’édition du 04/07/16 du mensuel Ruptures
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