Un an déjà.
Le gilet jaune, symbole de la lutte contre la hausse des prix des carburants, se retrouve chaque samedi dans les manifestations qui se déroulent dans le pays. Par dizaines de milliers, nous défilons, nous protestons, nous contestons cette politique libérale qui nous entraîne vers le gouffre. Que l’on habite à la campagne ou que l’on réside en ville, notre situation sociale se dégrade inexorablement depuis plus de trente ans.
Les gouvernants nous ont ignorés. Notre parole, nos cris, nos appels n’ont pas été entendus. Nous n’avions plus qu’une solution, montrer que nous existions et que nous étions nombreux. Le 17 novembre 2018 fut le signal du soulèvement populaire national.
L’occupation des ronds-points a surpris les dirigeants politiques, les syndicats, la population. D’invisibles, nous sommes devenus les faiseurs d’actualité.
Nous avons fait éclater les injustices, les inégalités, les déséquilibres de la société. La pauvreté, la précarité, le déclassement sont apparus dans leur réalité.
Pour la première fois dans notre grande histoire du pays, des petits patrons côtoyaient des ouvriers, des chômeurs rencontraient des salariés, des professions libérales, des auto entrepreneurs s’y retrouvaient aux côtés des aides ménagères, des jeunes dialoguaient avec des retraités.
Les ronds-points devenaient des lieux de vie collective. Les femmes, en masse, y jouaient un rôle dynamique, décisif. Elles y prenaient des initiatives dans la conduite du mouvement.
Le pouvoir a pris peur. Peur de la contagion, peur de voir se rassembler des catégories sociales aussi diverses et différentes, peur d’être obligé de changer ses orientations.
Après les louvoiements de décembre 2018 (les miettes lâchées) Macron et son gouvernement choisissent la répression pour mater le mouvement.
Samedi après samedi, le sinistre Castaner, ministre de l’intérieur, envoie sa police réprimer les manifestants. Le bilan est impressionnant : des morts, des blessés, des mains arrachées, des yeux crevés, des éborgnés, des mutilés à vie. Sans compter les matraqués, les gazés, les gardés à vue et les condamnés.
Des milliers de victimes touchant des manifestants mais aussi des touristes, des passants, des journalistes, des avocats, des médecins.
Un déchaînement de haine sans commune mesure. Jamais un mouvement social n’a connu une telle répression sous la Cinquième République. Ces violences policières répétées ont pour but de nous discréditer et de nous diviser. Le pouvoir cherche à nous faire passer pour des excités et ainsi à nous isoler de la population qui avait manifesté de la sympathie et de l’empathie à notre égard.
Son plan a partiellement réussi.
Bien que d’accords avec nos objectifs, nombre de manifestants ne participent plus. Le soutien massif de la population s’érode au fil du temps.
En utilisant les violences,le pouvoir et Macron ont réussi à nous affaiblir, nous marginaliser. Mais pas à nous détruire. Pour mieux nous brider, Macron déploie une stratégie intelligente basée sur un semblant de débat public côté cour et un autoritarisme musclé côté jardin.
Pour déjouer sa ruse, nous devons adapter notre stratégie en fonction de celle pratiquée par nos adversaires.
Notre ambition étant de réunir les gens qui souhaitent vivre mieux dans un pays plus juste, plus humain et plus libre, nous devons rechercher les conditions et les moyens d’y parvenir.
Nous devons retrouver l’élan, la sympathie, la diversité, l’unité que nous avions sur les ronds-points en 2018.
Pour y parvenir, deux chantiers sont à travailler ensemble.
Premier chantier, redéfinir clairement nos pôles revendicatifs pour répondre à celles et ceux qui nous interrogent sur nos demandes que les médias ignorent, déforment, critiquent et caricaturent pour nous ridiculiser.
Il s’agit de mesures qui prises séparément répondent à des exigences catégorielles mais appliquées globalement modifient radicalement la politique générale du pays. Ces propositions représentent un socle commun issu des cahiers de doléances présents depuis des mois sur les tables de travail du premier ministre et du président de la république. Doléances auxquelles ils refusent de répondre favorablement.
Autre chantier, celui des formes d’action. Nous devons réinventer des actions rassembleuses. Partout dans nos villages, nos villes, nos départements, rassemblons- nous avec nos voisins, nos amis, nos parents, nos collègues. Faisons circuler et connaître nos revendications qui sont le seul moyen de fédérer, de consolider, de rassembler.
Allons rencontrer les syndicalistes, les militants associatifs, les militants politiques que nous connaissons pour leur expliquer nos objectifs, notre démarche citoyenne qui ne s’oppose pas aux leurs. Nous avons des intérêts communs. Être gilet jaune n’est pas un parti, une opinion. Être gilet jaune, c’est être un citoyen engagé pour une façon de vivre digne et libre.
A l’exception des actionnaires, des financiers, des privilégiés du système, ceux qui ont du travail et ceux qui en sont privés, les retraités et les jeunes, la majorité de la population sont des gilets jaunes en puissance qui l’ignorent. A nous de les contacter, de les convaincre de rejoindre notre combat émancipateur.
Ensemble, préparons le nouveau monde humaniste dont nous rêvons !