23

Charlie Hebdo et la liberté bourgeoise d’expression

Rarement un concept n’a été aussi glorifié et exalté que la liberté d’expression. Président de la République, Gouvernement, Parlement et médias, dans une étrange communion, l’ont célébrée avec enthousiasme et exubérance. Et pendant que la classe dirigeante prétend défendre cette précieuse liberté, ses institutions répressives traquent, interpellent, jugent, condamnent et parfois emprisonnent tous ceux et toutes celles qui expriment une pensée différente ou tout simplement profèrent des mots vite interprétés comme faisant « l’apologie du terrorisme ». Un climat détestable règne aujourd’hui en France. Une forme de terrorisme intellectuel et de fascisation des esprits s’installe insidieusement au nom de la liberté d’expression.

«  Les idées dominantes d’une époque n’ont jamais été que les idées de la classe dominante » - Karl Marx

« Je continue de prendre pour modèle de référence le « Charlie » originel : le grand Charlie Chaplin qui ne s’est jamais moqué des pauvres » - Schlomo Sand

La classe dominante, sans vraiment le vouloir, présente sa liberté d’expression comme étant celle de toutes les autres classes sociales. Lorsqu’elle évoque la liberté d’expression, c’est à sa liberté qu’elle pense. Car elle est justement l’expression de ses propres intérêts. Ce qui est permis aux uns est interdit aux autres. Autrement comment peut-on expliquer cet acharnement à vouloir taire et étouffer tout ce qui se dresse, d’une manière ou d’une autre, contre la pensée dominante (voir le sort réservé aux syndicalistes, intellectuels contestataires, journalistes, humoristes, lanceurs d’alerte etc. etc. ). Les grands médias, qui ont une influence considérable sur l’opinion publique, sont concentrés entre les mains de puissants groupes industriels et financiers qui utilisent la liberté d’expression uniquement pour servir leurs intérêts économiques et idéologiques. La liberté d’expression reste un privilège de classe.

Est libre toute expression qui sert directement ou indirectement les intérêts dominants. Est suspecte, voire parfois criminelle, toute pensée différente. Même les enfants et les adolescents n’échappent pas à cette logique de suspicion et de répression (1). Leur parole spontanée heurte la vérité officielle. Il faut la condamner. Cette répression constitue par elle-même une éclatante négation de cette fameuse liberté bourgeoise d’expression.

Les idées autres que celles du pouvoir deviennent insupportables. Seule la liberté d’expression de la classe dominante doit régner : « L’école est en première ligne aussi pour répondre à une autre question car même là où il n’y a pas eu d’incidents il y a eu de trop nombreux questionnements de la part des élèves, et nous avons tous entendu les “oui je soutiens Charlie, mais…”, Les deux poids deux mesures. Pourquoi défendre la liberté d’expression ici et pas là ? Ces questions nous sont insupportables » déclarait une éminente représentante du Gouvernement (2). Donc plus de questionnements, plus d’interrogations, plus d’esprit critique, plus rien. Place au gavage et au dressage.

Beaucoup de professeurs travaillent aujourd’hui dans des conditions difficiles sous l’œil vigilant des parents d’élèves, de l’administration, de la police et des procureurs. Aucun professeur n’est à l’abri d’accusation, de dénonciation et autre délation.

Les citoyens ne doivent plus s’interroger sur le drame de Charlie Hebdo. Plus de questions sur les racines du terrorisme, sur le rôle des États-Unis, de la France, de l’Arabie Saoudite, du Qatar et de la Turquie dans la création de ces groupes armés qui sèment aujourd’hui la terreur un peu partout à travers la planète . Ils doivent seulement répéter ce que le pouvoir pense à leur place. C’est la seule liberté d’expression qu’on leur laisse.

Plus de questions non plus sur la société française qui produit et produira probablement encore des monstres. Car le questionnement, les interrogations et la recherche des causes complexes internes et externes du terrorisme peuvent mettre en exergue les liens étroits qui existent entre les bourgeoisies occidentales et le terrorisme. Les terroristes ne tombent pas du ciel comme la pluie. Ils sont le produit de leur société et de leurs conditions matérielles d’existence (3).

Pour la classe dirigeante, ces questions sont tout simplement « insupportables ». La bourgeoisie est donc incapable de supporter une véritable liberté d’expression. Elle adopte en permanence de nouvelles lois, de plus en plus répressives, pour protéger sa propre liberté d’expression et partant ses propres intérêts. Elle s’attaque directement non seulement aux actes, mais également aux opinions (nouvel article 421- 2-5 du code pénal). Ainsi l’emploi du terme « apologie » dans la loi du 13 novembre 2014 renvoie à un discours, un écrit ou une opinion qui fait l’éloge ou qui glorifie le terrorisme. La loi confond ici opinion, aussi choquante soit-elle, et acte. Un écrit justifiant le terrorisme est assimilable à un acte terroriste. Il s’agit donc d’une pénalisation du délit d’opinion, une restriction à la liberté d’expression comme l’envisage la Cour européenne des droits de l’homme (4).

Mais au-delà de l’aspect judiciaire, c’est la dimension politique et idéologique qui intéresse la bourgeoisie. Il s’agit à travers la lutte contre le terrorisme de créer un climat, un sentiment d’union nationale permettant et facilitant non seulement de nouvelles attaques contre les libertés individuelles dont la liberté d’expression mais également l’application de politiques d’austérité qui ravagent aujourd’hui la France. Cet état d’esprit, basé sur l’exploitation de l’émotion, de la colère et de l’indignation suscitées par le drame de Charlie Hebdo, doit se prolonger le plus longtemps possible tellement il sert les intérêts de la classe dirigeante. « L’esprit du mois de janvier 2015, c’est l’unité de la République(...) Cet esprit-là, je dois le prolonger » disait le chef de l’État (5).

La liberté d’expression est une arme idéologique redoutable entre les mains de la bourgeoisie qui lui permet de mieux combattre celle des autres. Elle l’utilise pour marginaliser et réduire ses adversaires au silence tout en se présentant, paradoxalement, comme la grande protectrice de cette précieuse liberté. En définitive, la liberté d’expression est le reflet de cette lutte des classes qui déchire la société capitaliste.

Miguel Antonio

(1) http://www.franceinfo.fr/emission/france-info-numerique/2014-2015/apologie-du-terrorisme-un-enfant-de-8-ans-convoque-par-la-police-28-01-2015-22-10

Voir également http://www.laprovence.com/article/edition-arles/3246613/chateaurenard-ils-navaient-pas-respecte-laffiche-je-suis-charlie.html

(2) http://www.najat-vallaud-belkacem.com/2015/01/14/najat-vallaud-belkacem-je-mobilise-la-communaute-educative-pour-repondre-par-des-actes-forts/

(3) Même si le profil type du terroriste ou du djihadiste n’existe pas, il n’en demeure pas moins que les raisons profondes des terroristes français sont à chercher dans les conditions mêmes qui les ont vus naître et grandir. Il ne s’agit pas ici de justifier les horreurs et les crimes commis par ces terroristes et les souffrances qu’ils ont infligé aux familles des victimes, mais seulement d’évoquer très rapidement les situations économiques et sociales que subissent une partie des jeunes des classes populaires.

Quelle a été par exemple l’enfance des frères Kouachi ? Misérable ! Absence du père et une mère qui se prostituait pour pouvoir élever ses enfants. Abandonnée à son triste sort, elle a mis un terme à sa vie. Il ne s’agit là que d’un exemple parmi tant d’autres tellement la situation faite aux enfants des travailleurs immigrés par la classe dominante est insupportable. Parqués dans des ghettos entourant les grandes métropoles industrielles, ils subissent plus que les autres catégories de la population toute sorte de violence, d’humiliation, de rejet et de mépris. Leur religion est caricaturée au sens propre et figuré par une partie des médias et par des intellectuels au service de l’ordre établi. La laïcité est souvent utilisée comme une arme contre l’Islam et les musulmans de France. Le monde politique et médiatique leur est hermétiquement fermé. La liste des jeunes, morts dans les commissariats ou lors des interpellations est, hélas, trop longue. Échec scolaire, discriminations massives à l’embauche et au logement, insultes des hommes politiques (sauvageons, voyous, racaille, Kärcher, Casseurs... ), contrôles au faciès ont convaincu ces damnés de la terre qu’ils ne font pas partie de la communauté nationale. http://www.ville.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_onzus_2011.pdf voir également : http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/114000053/0000.pdf

Rejetés, frustrés et désespérés, une petite minorité de ces jeunes tombent facilement dans les griffes des recruteurs professionnels qui les arrachent littéralement à leur milieu et à leur famille. Contre les humiliations accumulées, le djihad est vécu comme une revanche violente contre une République qui les a vus naître sur son sol, mais qui les a rejetés.

La propagande intense développée par les bourgeoisies occidentales contre le régime de Bachar a largement contribué au départ de ces jeunes pour la Syrie avec la complicité de la Turquie. Le soutien indéfectible des gouvernements occidentaux à l’État d’Israël et la destruction de l’Afghanistan, de l’Irak, de la Libye et aujourd’hui de la Syrie avec l’aide des groupes terroristes qu’ils ont créés sont vus par ces jeunes non pas comme des calculs et des manœuvres de l’impérialisme pour servir ses intérêts économiques et stratégiques, mais comme une guerre de l’occident contre l’Islam et les musulmans.

(4) http://www.vigo-avocats.com/media/article/s6/id566/cff8e3f8340f9c9dc69208fa42eae912.pdf

(5) http://www.elysee.fr/conferences-de-presse/article/5e-conference-de-presse-du-president-francois-hollande-2/

 http://www.belaali.com/2015/03/charlie-hebdo-et-la-liberte-bourgeoise-d-expression.html
Print Friendly and PDF

COMMENTAIRES  

14/03/2015 11:59 par gérard

Article sidérant, à me pincer pour me convaincre de n’avoir pas rêvé...
« Les citoyens ne doivent plus s’interroger sur le drame de Charlie Hebdo. Plus de questions sur les racines du terrorisme, sur le rôle des États-Unis, de la France, de l’Arabie Saoudite, du Qatar et de la Turquie...etcetc  »
Depuis quand et où ? A la télé ? Ce n’est pas un scoop...
« Je continue de prendre pour modèle de référence le « Charlie » originel : le grand Charlie Chaplin qui ne s’est jamais moqué des pauvres » - Schlomo Sand.
D’une part c’est faux, il ne s’est jamais moqué de la Pauvreté, nuance !
Et quel peut être le rapport entre Charlie Hebdo et Charlie Chaplin ? Il y en a autant qu’avec la choucroute...
Que Schlomo Sand (en qui j’avais pourtant une certaine estime) fasse le ménage dans ce qu’il connaît, le peuple Juif, et les vaches seront bien gardées...
L’esprit critique, certes il faut l’avoir et il fait partie de la "liberté d’expression", mais il ne peut sous aucun prétexte précéder l’acquisition des connaissances. Et le rôle premier des enfants est de se forger des outils dans ce but...Il leur est essentiel de savoir lire un texte et en faire ressortir sa "substantifique moelle". Une langue n’est guère différente de n’importe quel outil complexe qu’il faut apprendre à s’en servir afin de bien le maîtriser.
Sauf que le 7/1 n’avait rien à voir avec un problème de liberté d’expression.
Je suis à des années-lumière d’être pour ce gouvernement, mais l’accent qui est mis actuellement sur l’acquisition de la langue française est une excellente chose. Il faut absolument maîtriser une langue pour être en mesure d’analyser et de comprendre une société dans laquelle on vit, société qui n’est que la prolongation entre autre de tous ses écrivains, philosophes etc...
Je n’aime(ais) pourtant pas Michel Onfray, mais je suis d’accord avec lui quand il dit : « Moi qui suis de gauche, je préférais une idée juste, fut-elle de droite, à une idée fausse même si elle est de gauche, surtout si elle est de gauche »
Faudra que je lise Alain de Benoist...
Tant que la gauche n’aura pas abandonné ses notions "universalistes", sa descente aux enfers continuera...
A "un autre Monde est possible", si je me souviens bien, le sous commandant Marcos préférait "d’autres Mondes sont possibles", alors ?

Beaucoup de professeurs travaillent aujourd’hui dans des conditions difficiles sous l’œil vigilant des parents d’élèves, de l’administration, de la police et des procureurs. Aucun professeur n’est à l’abri d’accusation, de dénonciation et autre délation.

Dans la liste, je tiens à signaler qu’il y manque l’armée...

14/03/2015 14:49 par Maxime Vivas

Tant que la gauche n’aura pas abandonné ses notions "universalistes", sa descente aux enfers continuera...

C’est parce qu’elle les a abandonnées qu’elle descend.
C’est parce qu’après le siècle des Lumières est arrivé le siècle des Ténèbres.

14/03/2015 17:20 par mandrin

le drone st-cricq bientôt dans le ciel de France...

14/03/2015 18:39 par christophe

Charlie-Charlot (de Rose)
« Vous êtes, Chaplin, l’escroc aux sentiments, le maître chanteur de la souffrance (...) Allez vous coucher, fasciste larvé (...), mourez vite, nous vous ferons des obsèques de première classe. Les feux de la rampe ont fait fondre le fard du soi-disant mime génial et l’on ne voit plus qu’un vieillard sinistre et intéressé. Go home, Mister Chaplin. » Guy Debord – Internationale Lettriste N°1

14/03/2015 19:37 par gérard

@ Maxime
Je ne sais pas si le terme "universaliste" que j’ai utilisé, était le bon...
Je l’avais mis en liaison avec ce que j’avais entendu de la part du sous-commandant Marcos (dans une émission de Mermet), il avait rétorqué : "non, d’autres Mondes sont possibles", sous entendu ou exprimé, je ne me souviens pas exactement, en fonction de l’Histoire de chaque Pays, donc d’un certain esprit nationaliste par conséquent à l’opposé d’universaliste, je ne parlais pas ici de valeurs...
Encore qu’au niveau des "valeurs" universelles de la Gauche il y aurait sérieusement à redire, notamment sur le "mariage pour tous"...Il fut une époque où se marier étant de gauche, c’était plus que ringard, m’enfin...
La "liberté d’expression" n’est pas du tout le fait de la "classe dominante", l’a t-elle jamais été ?... Et quelle est exactement la nature de cette classe ?
La "liberté d’expression" est surtout le fait de TOUTE la classe politique. Pour différentes raisons à Droite comme à Gauche, les Politiques ont bâti leurs pouvoirs sur des mensonges et sur le fait de ne pas vouloir ou pouvoir s’en sortir.
Je réitère mon point de vue que j’ai déjà pas mal de fois exprimé, je ne vois pas dans les événements du 7/1 ni la cause ni la conséquence de la liberté d’expression, mais un ensemble de causes et de conséquences des mensonges de l’Occident sur le Moyen Orient depuis le 11 Septembre...
Je n’ai pas pu m’en empêcher !

14/03/2015 21:25 par reymans

Plutot d’accord avec Maxime VIVAS sur ce coup
Comment parler de valeurs universalistes quand on s’aligne de manière systématique sur les vues guerrieres des neocons ?
C’est plutot les perdre, ces valeurs universalistes, que de promouvoir une guerre d’une part, en oubliant tout aspect (autre que cosmétique, démagogique et opportuniste-politique-non-suivi-d’effet) lié à la composante social (lutte de classes) des différentes crises qu’on nous colle sur le paletot...
Non, pour moi il n’y a plus de gauche, en tout cas plus chez les socialistes au pouvoir, et c’est bien là le coeur du problème...Plus que des mougeons alignés finalement, c’est bien triste. Une vraie trahison idéologique même, je ne macherais pas mes mots tant la déception, doux euphémisme, est grande

15/03/2015 10:03 par reymans

"je ne vois pas dans les événements du 7/1 ni la cause ni la conséquence de la liberté d’expression, mais un ensemble de causes et de conséquences des mensonges de l’Occident sur le Moyen Orient depuis le 11 Septembre..."

Là par contre totalement d’accord, tout cela n’est que prétexte à mes yeux. Prétexte à serrage de vis et propagande va-t-en-guerre pour nos politiques pour les conséquences. Et pour les auteurs et/ou potentiels commanditaires, la sacro-sainte liberté d’expression n’est qu’un simple pretexte pour commettre le pire, qu’on sent bien etre inévitable quelle que soit la forme pour ce qui est des causes...
A force de tirer sur la corde elle se romp, c’est un peu à cela qu’on a assisté en ce qui me concerne

15/03/2015 10:14 par Autrement

Gérard :

"l’accent qui est mis actuellement sur l’acquisition de la langue française est une excellente chose."

Première nouvelle ! En paroles - lénifiantes et mensongères - peut-être !!
Mais l’accent n’est pas mis... sur la diminution des horaires d’enseignement du français au collège et au lycée !
Au contraire, on va encore amputer de 4h l’ensemble des disciplines fondamentales (dont l’histoire-géo).
La pétition suivante date de...2005 !! Et depuis, toujours rien, et dix ans après, moins que rien !

"APPEL POUR LE RÉTABLISSEMENT DES HORAIRES DE FRANÇAIS.
En 1976,
un élève qui sortait du collège avait reçu 2800 heures d’enseignement du français depuis son entrée au cours préparatoire.
En 2004,
il en a reçu 800 de moins. Il a donc perdu l’équivalent de deux années et demie. C’est comme si, au milieu de son année de cinquième, on le faisait passer en seconde.
Puisque la lutte contre l’illettrisme est une priorité, et que l’efficacité d’un apprentissage dépend aussi du temps qui lui est consacré,

NOUS DEMANDONS QUE SOIENT ADOPTÉS LES HORAIRES SUIVANTS :
1/ à l’école primaire
- en CP, 15 heures par semaine au lieu de 9 heures 30 ;
- en CE 1, 11 heures 30 au lieu de 9 heures 30 ;
- en CE 2, 11 heures 30 au lieu de 6 heures 30 ;
- en CM 1 et CM 2, 9 heures au lieu de 6 heures 30 ;
2/ au collège
- en 6e, 6 heures par semaine, dont trois dédoublées, au lieu de 5 heures ;
- en 5e, 6 heures, dont deux dédoublées, au lieu de 4 heures ;
- en 4e, 5 heures, dont une dédoublée, au lieu de 4 heures ;
- en 3e, 5 heures au lieu de 4 heures 30 ;
C’est ce dont avait bénéficié le collégien de 1976. On ne peut parler honnêtement de lutte contre l’illettrisme ou de démocratisation du secondaire en refusant aux élèves d’aujourd’hui ce qu’on accordait hier à leurs aînés.
Ces mesures auraient un impact direct sur la qualité d’apprentissage de toutes les matières, puisque aucun enfant n’apprend volontiers s’il ne sait lire et écrire aisément."
A.P.F.L.A.-prépa (Association des Professeurs de Français et de Langues Anciennes de Classes Préparatoires),
A.P.L. (Association des Professeurs de Lettres),
A.P.P.L.S. (Association des Professeurs de Lettres et de Première Supérieure),
C.N.A.R.E.L.A. (Coordination Nationale des Associations Régionales des Enseignants de Langues Anciennes),
Défense de la Langue Française
Sauver les Lettres (http://www.sauv.net/horaires.php)
S.E.L. (Sauvegarde des enseignements littéraires).

15/03/2015 16:27 par gérard

@ Autrement
Merci pour cette rectification et pour ces précisions.
Au Canard Enchaîné, on aurait dit : "pan sur le bec !"
J’ai du comprendre de travers, je ne sais...
Disons que bien qu’étant dans une filière Maths, j’ai très tôt pris conscience de l’extrême importance de la maîtrise de sa Langue.
Je viens juste d’avoir au téléphone un couple d’amis instituteurs (Cm1, Cm2).
Je venais pour leur envoyer le lien de cet article, car ils ont "trop la tête dans le guidon" pour venir régulièrement sur LGS. Ils sont du style à s’investir peut-être plus que la moyenne. En gros ils ne confirment pas l’ambiance décrite dans cet article, et c’est surtout avec les parents d’élèves qu’il y a des problèmes (eux personnellement ? Je ne sais). Je peux sans hésitation aucune, avoir confiance en leurs appréciations. Mais comme ce ne sont que des avis ponctuels et pas dans des zones trop sensibles, difficile d’extrapoler.
J’en saurais plus d’ici une quinzaine de jours.

15/03/2015 19:33 par Cunégonde Godot

« Les idées dominantes d’une époque n’ont jamais été que les idées de la classe dominante » - Karl Marx.
Cette phrase est un lieu commun méritant d’être révisé à la lumière de notre époque, qui n’est plus celle de Karl Marx. Les idées dominantes de notre époque ne sont plus seulement, aujourd’hui, celles de la classe possédante, la grande bourgeoise parasitaire, mais aussi, et surtout, celles de la classe moyenne supérieure, la classe apparue dans le sillage de la grande bourgeoisie parasitaire historique à partir des années 60-70 du siècle passé, la classe consumériste par excellence, hors-sol, euromondialiste, communautariste et pseudo-universaliste simultanément productrice et consommatrice de la doxa.
Cette classse aujourd’hui prolifère et dépasse le cercle des clercs toujours historiquement au service des puissants, se reproduit à tous les sens du terme et se coopte dans toutes les strates de la communication en général, dans le divertissement de masse, dans l’enseignement, dans la grande culture qu’elle détruit méthodiquement (à France-Culture et France-Musique p.ex.), pas seulement dans la presse-système, mais aussi plus insidieusement dans les organes de communication autoproclamés "radicaux" ; dans les syndicats, les partis politiques et tous les corps intermédiaires. Elle est moderne par essence, elle EST le système, et quand elle voudrait par un éclair de lucidité ne pas l’être, elle l’est encore...
Rien ne résume mieux cette classe sociale schizophrénique que cette phrase mille fois formulée à propos du référendum sur l’ "Europe" du 29 mai 2005 : « Les Français n’ont rien compris à la question qui leur était posée », et bla-bla-bla, etc., condensé de l’idée que se fait de la démocratie cette classe sociale comme par hasard fervente... européiste...
Et le fin du fin n’est-il pas d’aller répétant... « les idées dominantes d’une époque n’ont jamais été que les idées de la classe dominante » (Karl Marx) et patati patata et prout prout prout ?...

15/03/2015 21:23 par Feufollet

L’apprentissage de sa langue ou de la langue de son pays est capitale
Si l’on veut former des citoyens capables de s’intéresser à d’autres choses que rien
Mais ça n’est pas le sujet du texte
Et l’histoire ne dit pas si un érudit en français s’intéressera plus à des auteurs
Humanistes socialisants ou à des auteurs ressortis des poubelles de l’histoire fasciste
Non le sujet est : pourquoi "charlie", pourquoi maintenant, pour qui la liberté d’expression ?
A qui le crime profite-t-il ?
Pour mes réponses, mon regard se tourne vers les obscures travées du pouvoir capitaliste
Et du cynisme de ses acteurs politiques et économiques
Sans parler plus de leurs déficiences morales et mentales

15/03/2015 22:49 par Dwaabala

Il est regrettable que cet article commette des confusions qui l’affaiblissent. Entre autres :

Ainsi l’emploi du terme « apologie » dans la loi du 13 novembre 2014 renvoie à un discours, un écrit ou une opinion qui fait l’éloge ou qui glorifie le terrorisme. La loi confond ici opinion, aussi choquante soit-elle, et acte. Un écrit justifiant le terrorisme est assimilable à un acte terroriste. Il s’agit donc d’une pénalisation du délit d’opinion, une restriction à la liberté d’expression comme l’envisage la Cour européenne des droits de l’homme (4).

Que dit la loi ?
« Art. 421-2-5.-Le fait de provoquer directement à des actes de terrorisme ou de faire publiquement l’apologie de ces actes est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende.
« Les peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et à 100 000 € d’amende lorsque les faits ont été commis en utilisant un service de communication au public en ligne.
« Lorsque les faits sont commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle ou de la communication au public en ligne, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la détermination des personnes responsables. »

Non. Selon le droit bourgeois, l’opinion est ce que l’on pense ; elle est libre. Je suis libre de penser que les frères Kouachi et Coulibali ont été des héros. Une opinion n’est pas une expression.

Toujours selon le droit, l’expression de cette opinion est soumise à des lois, sans pour autant être assimilée à l’« acte » auquel elle encourage éventuellement.

Si je tiens un discours public, ou si j’écris pour la publication ce que j’ai énoncé ci-dessus, cet « acte », car c’est juridiquement un « acte », tombe sous le coup de la loi.

Il par conséquent regrettable que cet article qui contient de fort bonnes choses tombe ici dans la confusion qu’il dénonce.

La loi ne confond pas l’opinion, aussi choquante soit-elle, et l’acte. L’acte est son expression publique.

Un écrit justifiant le terrorisme n’est pas assimilable à un acte terroriste. La preuve en est qu’il n’entraîne pas la même sanction.

Il ne s’agit donc d’une pénalisation du délit d’opinion, puisque l’opinion ne peut être un délit aussi longtemps qu’elle ne s’exprime pas publiquement.

Oui. Il s’agit d’une restriction à la liberté d’expression, quand cette expression pousse à attenter à la sécurité et à l’ordre publics.

15/03/2015 23:10 par Dwaabala

Si les idées dominantes n’étaient pas celles de la classe dominante ( dont la structure reste à spécifier), chacun s’en apercevrait vite, puisque c’est précisément la classe dominante qui détient les grands moyens matériels d’expression, presse, radio, télévision (de façon indirecte quand ces dernières sont publiques, comme les filles du même nom), de même qu’elles dominent les livres d’histoire, de géographie ou de SVT, donc les programmes, dans les établissements d’enseignement

16/03/2015 02:30 par Dwaabala

Pour paraphraser Karl Marx, qui donne des boutons et des flatulences à @ Cunégonde Godot.

Il ne faut pas s’imaginer non plus que les représentants de la classe dominante sont tous des businessmen ou des financiers ou qu’ils s’enthousiasment pour ces derniers. Ils peuvent, par leur culture et leur situation personnelle, être séparés d’eux par un abîme. Ce qui en fait les représentants de la classe dominante, c’est que leur cerveau ne peut dépasser les limites que le bourgeois ne dépasse pas lui-même dans sa vie, et que, par conséquent, ils sont théoriquement poussés aux mêmes problèmes et aux mêmes solutions auxquelles leur intérêt matériel et leur situation sociale poussent pratiquement les bourgeois. Tel est, d’une façon générale, le rapport qui existe entre les représentants politiques et littéraires d’une classe et la classe qu’ils représentent.

16/03/2015 07:57 par gérard

@ Dwaabala
En l’occurrence dans cet article il ne s’agit pas des "idées dominantes" :
« La classe dominante, sans vraiment le vouloir, présente sa liberté d’expression comme étant celle de toutes les autres classes sociales », mais de la "liberté d’expression", nuance...
C’est chaque Parti Politique qui détermine ce qu’il faut ou ce qu’il ne faut pas dire dans sa "chapelle", et donc avec sa propre conception de la "liberté d’expression".
Quant à « la classe dominante » dont, je suis d’accord (et avec Cunégonde Godot) « la structure reste à spécifier », je pense qu’elle est inévitablement celle qui transcende les partis politiques de tous bords et dont le nombre en fait la force : la moyenne bourgeoisie tout simplement, creuset sans fond de la bêtise :
la Bêtise, c’est Brel qui l’a on ne peut plus bien décrite et très souvent fustigée, au même titre que la bourgeoisie :
« C’est terrible, c’est la mauvaise fée du Monde, c’est la sorcière du Monde (...) la bêtise c’est de la paresse (...) la bêtise c’est un type qui vit et qui dit "ça me suffit", "je vis, je vais bien, ça me suffit".
Il ne se botte pas le cul tous les matins en se disant "c’est pas assez, tu ne sais pas assez de choses, tu ne vois pas assez de choses, tu ne fais pas assez de choses", c’est de la paresse. Une espèce de graisse autour du cœur qui règne, une espèce de graisse autour du cerveau,(...)
 ».
Et cette "paresse" va faire insidieusement se graver dans le marbre des dogmes bourgeois communs de "liberté d’expression" entre ceux qui se disent de droite et ceux prétendument de gauche, contre tout ce qui risquerait de déranger leur confort, leur "graisse autour du cerveau".
« La bourgeoisie est donc incapable de supporter une véritable liberté d’expression. Elle adopte en permanence de nouvelles lois(...)La loi confond ici opinion, aussi choquante soit-elle, et acte (...)Il s’agit donc d’une pénalisation du délit d’opinion, une restriction à la liberté d’expression (...) »
C’est donc la "bourgeoisie" qui a pondu une "certaine" loi que beaucoup avaient prévenu qu’elle allait inévitablement dériver sérieux ?
Ben voilà, c’est parti !
Mais ce qui s’est passé avec Charlie je continue à penser que ça n’a strictement rien à voir avec la "liberté d’expression". Bien évidemment que je n’en connais pas les causes réelles (les connaîtrons nous un jour ?) , mais il y a de fortes chances pour que ce fut une conséquence de la politique étrangère désastreuse (euphémisme) de la France au Moyen Orient.
De la Droite, je n’en ai cure, mais que la Gauche endosse elle aussi, une très lourde part de responsabilité dans cette affaire, là c’est une toute autre histoire...pas mal désespérante.

16/03/2015 10:31 par Dwaabala

@ gérard
C’est bien à @ Cunégone Godot et à son prout, prout sur les idées dominantes et K. Marx que je réponds, et à son salmigondis habituel sur les classes moyennes.
Quand à la « liberté d’expression » elle est à son acmé dans l’expression des idées dominantes, qui ne sont pas du tout celles du petit-bourgeois, bien qu’il s’imagine que le soleil tourne autour de lui.

20/03/2015 14:32 par Cunégonde Godot

Ce n’est pas la grande bourgeoisie qui ne supporte pas la liberté d’expression, corollaire de la liberté d’opinion — c’est même de tout temps sa danseuse en quelque sorte —, mais plutôt sa domesticité petite-bourgeoise barricadée dans les médias p.ex., la classe moyenne supérieure proliférante des petits marquis à son service, mimant sans qu’on lui demande, mais à prix discount, le modèle culturel de la grande bourgeoisie possédante, mais en plus bête. La petite-bourgeoisie supérieure "invente" sa propre (sous)-culture essentiellement concentrée dans l’événementiel cultureux et le festif propagandiste (fête de ceci, journée de cela, festivals machin, folle journée pouet-pouet et leurs produits dérivés, etc.).
Le prototype de l’idée dominante aujourd’hui, concentrée dans la classe moyenne "supérieure" : l’ "Europe". Ce qui n’empêche nullement cette classe qui l’incarne si bien de s’affliger du TAFTA, comme si celui-ci n’était pas l’aboutissement de celle-là...

21/03/2015 04:01 par Dwaabala

@ Cunégonde Godot

Ce n’est pas la grande bourgeoisie qui ne supporte pas la liberté d’expression

On ne peut être plus véridique, puisque c’est la finance qui administre la liberté d’expression.

21/03/2015 09:15 par gérard

@ Dwaalabala.
« c’est la finance qui administre la liberté d’expression. »
La Finance n’en a rien à faire de la "liberté d’expression" qui est malmenée aussi bien par la Droite que par la gôche et même hélas par la Gauche. Elle n’a qu’à laisser faire, d’autant plus qu’elle détient LE pouvoir, alors pourquoi se fatiguer à administrer quoique ce soit...
J’aime bien l’intervention 20/03/2015 à 14:32 par Cunégonde Godot
« La petite-bourgeoisie supérieure "invente" sa propre (sous)-culture essentiellement concentrée dans l’événementiel cultureux et le festif propagandiste (fête de ceci, journée de cela, festivals machin, folle journée pouet-pouet et leurs produits dérivés, etc.). »
J’aurais même dit "la bourgeoisie tout court" que toute "liberté d’expression" effraie tant le risque est grand de la déranger dans son confort, petit ou grand, peu importe... Mais j’ai déjà exprimé mon point de vue, oserai-je dire "brel...ien", mais qui était aussi celui de Brassens , de Léo Ferré, de Boris Vian, de Prévert, pour ne citer qu’eux.

21/03/2015 13:47 par Dwaabala

@ gérard

... qui administre...

au sens concret, c’est-à-dire qui tient les capitaux. Et n’allez pas dire là dessus que c’est la petite-bourgeoisie : vous m’obligeriez à faire une pénible démonstration au sujet des détenteurs des grands moyens de communication.

21/03/2015 14:04 par Dwaabala

@ gérard
Et je répète , à la suite de K. Marx, qui avait génialement cerné la question :
Il ne faut pas s’imaginer non plus que les représentants de la classe dominante sont tous des businessmen ou des financiers ou qu’ils s’enthousiasment pour ces derniers. Ils peuvent, par leur culture et leur situation personnelle, être séparés d’eux par un abîme. Ce qui en fait les représentants de la classe dominante, c’est que leur cerveau ne peut dépasser les limites que le bourgeois ne dépasse pas lui-même dans sa vie, et que, par conséquent, ils sont théoriquement poussés aux mêmes problèmes et aux mêmes solutions auxquelles leur intérêt matériel et leur situation sociale poussent pratiquement les bourgeois. Tel est, d’une façon générale, le rapport qui existe entre les représentants politiques et littéraires d’une classe et la classe qu’ils représentent.

22/03/2015 13:28 par Zouine

Monsieur,
La publication de votre article contredit son contenu. Il est la preuve que la liberté d’expression existe dans un pays démocratique, une société pluraliste et qu’elle permet la critique et l’exercice de l’esprit critique. Essayez d’exercer la critique dans un régime totalitaire ou la liberté individuelle, l’exercice de la pensée sont une menace pour la dictature et le dictateur. Enfin, le racisme, l’antisémitisme, le terrorisme,..., ne sont pas une opinion mais un délit et un crime.

04/05/2015 21:03 par Christian DEL.

CHARLIE : 11 JANVIER D’ EN-BAS et 11 JANVIER D’ EN-HAUT
Sortir de la confusion et des amalgames !
http://amitie-entre-les-peuples.org/CHARLIE-11-JANVIER-D-EN-BAS-et-11

(Commentaires désactivés)
 Twitter        
« Informer n'est pas une liberté pour la presse mais un devoir »
© CopyLeft : Diffusion du contenu autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
 Contact |   Faire un don