34 PLANS DE RECONQUÊTE POUR DESSINER LA FRANCE DE DEMAIN
Une étude commandée par Arnaud Montebourg au réputé et très libéral cabinet Anglo-saxon de conseil en stratégie McKinsey, a donné naissance aux « 34 plans de reconquête pour dessiner la France de demain » au rang desquels le domaine des énergies occupait la première place.
En septembre 2013, François Hollande en annonçait fièrement la mise en œuvre et clamait sa foi en la transition énergétique, le TGV du futur ou les inévitables nouvelles technologies, pour sauver l’industrie. Le 6 mai 2014, une semaine après la décision des administrateurs d’Alstom, en faveur d’une cession à General Electric, le président faisait part de son empressement de reconstruire la France de demain « Je veux que ça aille vite, nous n’avons plus de temps à perdre ». Mais celui-ci ne semble pas avoir appréhendé toute la complexité et le coût de chantiers industriels nationaux.
DES FLEURONS BRADÉS
En effet, la plupart des fleurons nationaux que les gouvernements successifs ont eu la faiblesse d’abandonner depuis 30 ans, ont été patiemment construits durant des décennies et parfois plus d’un siècle fût nécessaire. Autrefois, les intérêts nationaux et ceux de ces géants convergeaient. Aussi, ces joyaux de l’industrie française ont bénéficié d’allégements fiscaux et de dizaines de milliards d’euros d’aides de l’état pour assurer leur développement, leur R&D et parfois leur sauvetage. Pour exemple, la privatisation d’Usinor-Sacilor, 3eme groupe sidérurgiste mondial en 1995, qui réalisait un chiffre d’affaire de prés de 80 milliards de francs et 4.4 milliards de résultat net, n’a rapporté à l’État que 10 milliards de francs. Mais le sauvetage de la sidérurgie aura couté, jusqu’à sa vente en 1995, plus de 100 milliards de francs aux contribuables français.
Aujourd’hui, les propriétaires de ces symboles français ont souvent acquis à peu de frais au regard du coût réel pour la collectivité, des édifices pour lesquels des générations de français ont travaillé et apporté leur contribution fiscale afin de construire la France dont ils seraient fiers et qui offrirait un avenir meilleur à leurs enfants. Car, bien qu’appartenant à leurs actionnaires, ces entreprises utilisent des équipements que la collectivité a parfois financés et sont dépositaires de savoir-faire et de brevets dont les R&D ont été quelquefois subventionnés par l’agent public, mais nous devrons à nouveau payer pour leur exploitation ou l’achat de matériels hautement technologiques indispensables.
QUELLE EFFICIENCE SUR L’EMPLOI ?
Le gouvernement table sur un objectif de 45 milliards d’euros de valeur ajoutée au bout de 10 ans, 18 milliards d’exportation en plus et la création ou la consolidation de 480 000 emplois au terme de dix ans. Cependant, même si l’on escompte un effet de levier sur l’investissement privé, le budget consacré de 3.7 milliards de prêts, selon Arnaud Montebourg, saupoudré sur 34 chantiers et sur une décennie, peut laisser dubitatif.
Le plan de relance de Nicolas Sarkozy de 2009, d’un montant de 34 milliards d’euros, devait, en 2009 et 2010, créer ou préserver 400 000 emplois, mais selon les sages de la cour des comptes, le nombre d’emplois finalement créés oscillait entre 18 000 à 72 000.
Aussi, on peut se demander si le gouvernement a réellement élaboré une stratégie ou si les 34 plans ne constituent qu’une opération de communication vouée à donner l’illusion d’une vision industrielle pour la France. Posture politicienne, jeu de rôles ? Le discours maintenant patriotique de personnalités dont les partis politiques préconisent la délocalisation de l’industrie française depuis quarante années, peut surprendre.
Par ailleurs, les récentes initiatives gouvernementales en matière d’industrie dont Les États Généraux de l’Industrie de 2010, Le Grand Emprunt ou Le Plan de Relance, ont créés peu d’emploi, ont surtout bénéficié aux grands groupes et accéléré la désindustrialisation. En effet, la priorisation de nouveaux projets, décrétée par l’État, contribue souvent à l’exclusion des outils de financement publics ou privés de l’Économie, des industries manufacturières souvent viables mais dés lors jugées dépassées. Ainsi, des pans entiers d’industrie ont été détruits. En 2013, le nombre de défaillances d’entreprises était en hausse de 3 % et on déplorait 63 000 dépôts de bilan dont ceux de nombreuses usines, ateliers et entreprises aux activités directement ou indirectement liées à l’artisanat et à l’industrie française. Bien souvent, celles-ci ne disposaient pas des financements qui leur auraient permis d’évoluer et de survivre. Le pilotage des 34 plans est majoritairement confié à des multinationales et il n’est pas acquis que la relance de l’industrie française et la préservation du patrimoine industriel ou de l’emploi ouvrier en France, constituent pour celles-ci, une réelle préoccupation.
On peut donc craindre que les plans de reconquête ne compensent jamais l’incessante disparition de leaders industriels français mais aussi de multiples entreprises réputées, pourtant innovantes ou détentrices de savoir-faire uniques mais pour le sauvetage desquelles, le pouvoir politique semble impuissant.
Cependant, l’absence d’implication de l’état dans la préservation d’une entreprise dont les activités sont pourtant tellement stratégiques pour la filière de l’énergie, n’est pas si étonnante si l’on réfère aux sollicitations du président français à destination de tous les potentiels investisseurs à travers le monde. Un diner organisé le dimanche 23 février 2014 à l’Élysée, regroupait les dirigeants des grands groupes internationaux, au premier rang desquels figuraient ceux de General Electric et de Siemens qui, 2 mois plus tard, ont semble-t-il, répondu aux prières de François Hollande.
Francis JOURNOT
www.vetements-made-in-france.com,
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