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Une Banque mondiale toujours antidémocratique

Malgré un trafic aérien perturbé par le volcan islandais, la plupart des
Ministres des finances et des gouverneurs des banques centrales se sont
retrouvés à Washington en avril dernier pour une rencontre du G20 suivie de
l’Assemblée de printemps du FMI et de la Banque mondiale.

Washington centre de décision planétaire

A cette occasion, après le FMI voici quelques années, la Banque mondiale a
annoncé l’aboutissement d’une réforme présentée comme historique : le
rééquilibrage de ses droits de vote en faveur des pays du Sud. En effet,
depuis sa création en 1944, la Banque mondiale -tout comme le FMI- accorde à 
ses pays membres des droits de vote proportionnels à leur poids dans
l’économie mondiale (1).

Les pays les plus industrialisés, Etats-Unis en tête, se taillent donc la
part du lion et règnent en maîtres incontestés au sein de ces institutions
tant décriées dans le monde.

Le poids grandissant des pays émergents et la grave crise actuelle dont
l’épicentre se trouve au Nord ont fait écho aux demandes de certains pays
d’être mieux représentés au sein de la Banque mondiale. Après plusieurs
années de discussions et de tergiversations, la montagne a accouché d’une
souris : le transfert de 3,13% des droits de vote vers les pays émergents,
au bénéfice principalement de la Chine (ses droits de vote passeront de
2,77% à 4,42%), du Brésil (de 2,06% à 2,24%) et de l’Inde (de 2,77% à 
2,91%). Autant dire bien trop peu pour modifier les rapports de force à la
Banque mondiale, car si la part des pays du Sud progresse, elle reste
limitée à 47,19%, alors qu’ils représentent plus de 85% de la population
mondiale.

Il s’agit là de la première augmentation du capital de la Banque mondiale
depuis 1987, mais elle est bien dérisoire. Ainsi, la Chine, pourtant peuplée
d’environ 1,4 milliard d’individus, va détenir des droits de vote à peu près
équivalents à ceux de la France avec ses 63 millions d’habitants. La
situation pour les pays émergents n’était plus acceptable depuis longtemps
et les pays du « BRIC » (Brésil, Russie, Inde et Chine) proclamait quelques
jours auparavant : « Le FMI et la Banque mondiale ont un besoin urgent de
résoudre leur déficit de légitimité » (2).

Pour autant, ne nous méprenons pas : le but n’est pas de promouvoir une
autre logique, mais d’accorder à quelques dirigeants un strapontin à la
table des grands. La Banque mondiale n’a donc pas fini d’imposer le
Consensus de Washington et ses politiques dévastatrices.

« Protégeant la voix des pays les plus petits et les plus pauvres » ?

Comme annoncé au sommet du G20 de Pittsburgh en septembre 2009, la réforme
portant sur une nouvelle répartition des droits de vote au sein de la Banque
mondiale a donc été validée à Washington le 25 avril 2010. Timothy Geithner,
secrétaire au Trésor des Etats-Unis, s’en est félicité : « La nouvelle
formule reflètera mieux le poids des pays en développement et en transition
dans l’économie mondiale, tout en protégeant la voix des pays les plus
petits et les plus pauvres » (3).

C’est en apparence une bonne nouvelle pour les pays africains qui, dans leur
ensemble, ne pèsent qu’un peu plus de 7% de ces mêmes droits de vote, soit
environ autant que le seul Japon. Quoi qu’il en soit, cette réforme
n’enlèvera pas à Washington le mot de la fin : les Etats-Unis gardent leur
quote-part inchangée à 15,85% et conservent leur droit de veto de fait
puisqu’il est nécessaire de rassembler plus de 85% des voix pour valider
toute proposition engageant l’avenir de la Banque mondiale. De même, la
règle tacite selon laquelle le poste de président du Groupe de la Banque
mondiale serait réservé à un États-Unien est toujours d’actualité.

Pourtant, la question des choix opérés par la Banque mondiale et imposés à 
la plupart des pays en développement doit être posée. Depuis les années
1970, elle porte une grande part de responsabilité dans le surendettement
des pays du Sud et les prêts qu’elle a accordés n’ont en général pas profité
aux populations. Au contraire, les réformes d’ajustement structurel exigées
par le FMI et la Banque mondiale ont conduit à la réduction des budgets
sociaux, à la suppression des subventions aux produits de première
nécessité, à la réduction des cultures vivrières au détriment des cultures
d’exportation, à une libéralisation économique qui pénalise les producteurs
locaux face aux sociétés transnationales, à une privatisation des biens
communs, à une fiscalité qui aggrave les inégalités… Les projets financés
ont toujours visé à organiser l’accès à moindre coût aux richesses
naturelles du Sud et à leur transport sur le marché mondial, le financement
de projets qui contribuent au réchauffement climatique comme actuellement en
Afrique du Sud (4), le tout sans ciller en cas de violation des droits humains ou de
détournement de fonds du moment que le pays sert les intérêts de la Banque
mondiale et des grandes puissances.

Cette timide évolution n’est qu’une mascarade de plus, les pays d’Afrique
subsaharienne restent particulièrement sous-représentés et les grandes
puissances ont toujours les mains libres pour imposer leurs choix si
discutables. Le Conseil d’administration, organe de direction de la Banque,
reste inchangé avec 24 sièges, 8 étant réservés à des pays développés et les
16 autres destinés à des groupes de pays. L’Europe compte actuellement 9
administrateurs dans cette instance contre 2 sièges tournants pour
l’Afrique, qui reste à l’écart dans le processus de décision. L’Afrique dans
son ensemble a perdu 0,39 point en 2010, passant de 7,90% à 7,51 % de droit
de vote, soit environ autant que la France et l’Allemagne réunis.

Par ailleurs, le fait que le Venezuela, véritable bête noire des Etats-Unis,
soit le pays latino-américain qui ait le plus perdu en droits de vote (de
1,27% à 1,11%) ne doit rien au hasard.

Depuis sa création, la Banque mondiale a non seulement failli à sa mission
de lutter contre la pauvreté puisqu’elle l’accentue en défendant
l’imposition de plans d’ajustement structurel, mais elle joue un rôle majeur
dans le maintien du modèle néolibéral qui conduit les peuples à leur perte.
En défendant une sortie capitaliste de la crise, le FMI et la Banque
mondiale conduisent le monde dans une impasse tragique. La preuve vient
d’être faite qu’une réforme efficace menée de l’intérieur n’est pas
possible. Seule l’abolition de la Banque mondiale, et son remplacement par
une institution démocratique fonctionnant sous contrôle citoyen et
respectant la souveraineté des peuples, qui abandonne le consensus de
Washington et oeuvre dans le respect des droits humains fondamentaux, est une
issue acceptable. L’annulation inconditionnelle de la dette publique
libérerait les peuples opprimés par le néocolonialisme de l’endettement et
constituerait un premier pas vers leur émancipation.

Jérome Duval, Damien Millet
http://www.cadtm.org/Une-Banque-mondiale-toujours

(1) Voir Damien Millet et Eric Toussaint, 60 Questions 60 Réponses sur la dette, le
FMI et la Banque mondiale, CADTM-Syllepse, 2008.

(2) Déclaration souscrite par les présidents Luiz Inácio Lula da Silva (Brésil),
Dimitri Medvedev (Russie), Hu Jintao (Chine) et le premier ministre indien,
Manmohan Singh, "El FMI y el BM urgentemente necesitan resolver sus
déficits de legitimidad
"

(3) Discours devant le Comité de développement, assemblée générale des Etats
membres de la Banque mondiale, dimanche 25 avril 2010.

(4) Voir le financement pour la construction de la centrale à charbon de Medupi qui
émettra 25 millions de tonnes de CO²/an. Lire à ce sujet, Eric de
Ruest, Eskom : Charbon, mensonges et "greenwashing" à la Banque mondiale,

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