Cher Dwaabala (si tu permets), je vais "poser" moi aussi pour la bonne cause, c’est-à-dire pour un usage du langage comme arme de combat, qui permet de remettre le sens sur ses pieds, quand généralement il marche sur la tête, comme c’est le cas dans le langage actuellement dominant. On peut tout apprendre (ou presque) sur les "figures", dans un petit livre très savant, et très pittoresque par ses exemples, intitulé "Rhétorique générale" dont l’auteur est le collectif dit "Groupe μ" (plutôt des logiciens que des stylistes, mais ça va ensemble). Les figures y sont analysées par catégories de modifications affectant, soit la forme et la phonétique des mots (métaplasmes), soit l’ordre des mots (métataxes), soit la signification usuelle (métasémèmes), soit encore le rapport de l’énoncé à la personne de l’énonciateur ou à une situation extérieure (métalogismes). C’est de cette dernière catégorie que me semble relever le titre hardiment lancé par Théophraste. En effet il utilise un adverbe de disjonction ("entre"), mais apparemment il n’y a pas de second terme, et du point de vue de la logique du langage, la phrase n’a pas de sens. En réalité bien sûr, il y a une disjonction entre "un referendum et un autre" ; et justement parce qu’elle reste implicite, il devient encore plus clair que Théophraste n’en pense pas moins : il force ainsi le lecteur à remettre lui-même en question l’objet réel dont il s’agit. Au lieu de travailler sur le sens de mots, nous dit le logicien, "le rhétoriqueur peut faire appel à l’objectivité de la réalité, pour franchement s’en séparer et tirer effet de cette distanciation". L’effet recherché est clairement visible dans le dernier échantillon de la rubrique "Humour et politique" (Laurent Fabius) : c’est la mise en image du rébus, lequel en dit plus qu’une longue explication ! L’ironie aussi fait partie des figures par métalogisme. Mais puisqu’il me semble avoir lu de toi quelque part ici une réflexion sur Thucydide et la démocratie antique, j’ajoute que toute la rhétorique d’Aristote, qui passe en revue les lieux et les figures de l’argumentation, donne pour objet à cette étude (très pittoresque elle aussi) de déjouer les sophismes, les mensonges et les subterfuges de ceux qui, pour servir leurs intérêts, sont devenus experts en "communication", c’est-à-dire fabriquent de faux discours sur le réel , qu’ils s’efforcent d’accréditer à coups d’éthos et de pathos !