RSS SyndicationTwitterFacebook
Rechercher

Lise London : «  Soyez vous-mêmes, ouvrez les yeux »

Ce jour-là , dans la cuisine de son appartement proche de la place de la Nation à Paris, Lise London me tendait une tasse de café affirmant tout de go : «  En paraphrasant De Gaulle, je déclare que la vieillesse est un naufrage. » C’était il y a quinze ans. Lise London nous a quittés la semaine dernière à l’âge de quatre-vingt-seize ans. Elle ne manquait pas d’humour. Lorsqu’on l’interrogeait sur son engagement communiste, elle répliquait goguenarde : «  C’est mon jour des citations. Comme Aragon, j’affirme que chaque matin je me repose la question de mon choix politique et … je ré adhère au PCF. » Son engagement est resté intact jusqu’à sa mort.

On ne «  récupère » pas une grande dame comme Lise London. On la respecte. Si on a l’autorisation, on l’embrasse, fort si possible, et on écoute s’égrener une page d’histoire que les moins de cinquante ans ne connaissent pas. La vie miséreuse dans les années trente des immigrés espagnols à la recherche de travail du côté de Vénissieux, la découverte du monde des salariés, les premiers contacts avec des responsables communistes, l’engagement dans les Brigades Internationales parties défendre la République espagnole, l’action contre l’occupant nazi, la déportation à Ravensbrück, la tragédie d’une famille communiste face au totalitarisme stalinien. Lise London, c’est tout çà . Pas seulement.

Lise, c’est aussi et surtout une histoire d’amour. Une passion pour Artur London, l’homme qu’elle a aimé à en perdre la raison, l’homme qu’elle a défendu bec et ongles contre l’ignominie stalinienne, l’homme qu’elle a sorti de prison, qu’elle a soigné, qu’elle a protégé et à qui elle a donné envie de vivre et de se battre à nouveau, l’auteur de «  l’Aveu » anéanti par tant de cruautés retrouvant la force de témoigner et de combattre pour son idéal de toujours, le socialisme. Une telle femme ne peut laisser indifférent. Artur avait bien de la chance même si parfois la «  Mégère de la rue Daguerre », du nom de la rue où eu lieu la première manifestation contre les nazis à Paris, affichait un caractère explosif à décoiffer le plus placide de ses admirateurs. Madame n’était pas du genre «  facile ».

Elle était curieuse de tout. Passés à la question, ses visiteurs ne sortaient jamais indemne de la rencontre. Elle était d’une gentillesse savoureuse et savait aussi distribuer durement les coups. Elle ne prétendait pas dispenser le bon savoir et encore moins la correcte attitude mais ne faisait jamais l’économie de la critique surtout à l’égard de ses camarades égarés. Les communistes français en savent quelque chose. Et au moment où cette grande dame nous quitte, je ne peux m’empêcher de penser qu’elle nous laisse quelques messages. Celle qui a tant souffert à Ravensbrück plaçait au premier rang de ses énergies la lutte contre le fascisme. Lors de la grande manifestation du 1 er mai 2002 alors que Le Pen frappait à nos portes, Lise London rejoignait, aidée de sa canne, le défilé refusant l’aventure brune. Celle qui avait enduré dans sa chair le stalinisme et qui n’avait pas déserté son engagement de jeunesse invitait les nouvelles générations à douter, à  ouvrir les yeux, à ne pas s’enfermer dans des certitudes, à lutter contre la perversion des idéaux communistes. «  Soyez-vous-mêmes », lançait-elle aux jeunes rencontrés dans les écoles lors de multiples débats. Femme courage comme elle l’a démontré en Espagne contre les franquistes, à Paris contre les nazis, à Prague contre les staliniens, elle refusait la fatalité de l’ordre établi et clamait sa volonté de rester actrice de l’Histoire. L’ancienne petite immigrée de Vénissieux, la capitaine de la Résistance, la solidaire du camp de concentration, l’opposante aux totalitarismes, est restée jusqu’à sa mort une combattante contre l’injustice. Toutes les injustices.

José Fort

URL de cet article 16304
   
In Defense of Julian Assange
"This book shows why the Julian Assange case is one of the most important press freedom cases of this century or any other century."—James C. Goodale, former Vice Chairman and General Counsel of The New York Times. “I think the prosecution of him [Assange] would be a very, very bad precedent for publishers … from everything I know, he’s sort of in a classic publisher’s position and I think the law would have a very hard time drawing a distinction between The New York Times and WikiLeaks.” (…)
Agrandir | voir bibliographie

 

Du vivant des grands révolutionnaires, les classes d’oppresseurs les récompensent par d’incessantes persécutions ; elles accueillent leur doctrine par la fureur la plus sauvage, par la haine la plus farouche, par les campagnes les plus forcenées de mensonges et de calomnies. Après leur mort, on essaie d’en faire des icônes inoffensives, de les canoniser pour ainsi dire, d’entourer leur nom d’une certaine auréole afin de « consoler » les classes opprimées et de les mystifier ; ce faisant, on vide leur doctrine révolutionnaire de son contenu, on l’avilit et on en émousse le tranchant révolutionnaire.

Lénine

© Copy Left Le Grand Soir - Diffusion autorisée et même encouragée. Merci de mentionner les sources.
L'opinion des auteurs que nous publions ne reflète pas nécessairement celle du Grand Soir

Contacts | Qui sommes-nous ? | Administrateurs : Viktor Dedaj | Maxime Vivas | Bernard Gensane
Le saviez-vous ? Le Grand Soir a vu le jour en 2002.