Ils mentent comme des arracheurs d’espoir.

Le peuple et les voleurs

Nous vivons une époque terrible de "restauration", d’involution sociale, idéologique, civilisationnelle. C’est la revanche des classes dominantes sur 1789, 1936, la Libération, mai 68...

Depuis les années 1970, elles ont préparé minutieusement le terrain idéologique, avec la "Trilatérale", le pilonnage permanent contre les syndicats, l’Etat et les fonctionnaires, les offensives sur le thème des droits de l’homme, des libertés (réduites à la seule liberté d’expression), le matraquage contre le socialisme assimilé au goulag, la thèse des "deux totalitarismes" du vingtième siècle (renvoyés dos-à-dos), que l’on retrouve dans les manuels scolaires et les cours magistraux à l’Université ; le tout sur l’air du : "il n’y a pas d’alternative" au capitalisme ; alors que "oui on peut"...

Sur le plan économique, la financiarisation de l’économie, l’assaut contre le contrat social, les "rigidités", les statuts, les conventions collectives, la mise en place de l’individualisation des carrières, des salaires, des services, les primes "au mérite", le management par le stress, par "l’excellence", la "flexibilité", ont provoqué l’ affaiblissement du mouvement ouvrier, l’éclatement des solidarités de classe d’hier, et entraîné le triomphe de l’individualisme et la guerre de tous contre tous. Et le système voudrait que nous intériorisions ces défaites, que nous renoncions à être nous-mêmes, à nous penser nous-mêmes, que nous renoncions à l’espérance, à chercher les causes de ce qui nous empêche de vivre bien et heureux. Ils nous rabâchent qu’il n’y a que des solutions individuelles... à des problèmes collectifs. Ils mentent comme des arracheurs d’espoir.

Les exploiteurs sont parvenus à ce qu’une majorité de salariés intègrent une nov-langue, acceptent leur propre exploitation et ce qu’ils rejetaient hier : les abandons de souveraineté sur la politique extérieure, la monnaie (celui qui ne contrôle pas la monnaie ne contrôle rien), le profit, l’accumulation capitaliste, la baisse du coût du travail, la collaboration de classes, la "figure" du patron, aujourd’hui "manager", décideur", "chef d’entreprise", "capitaine d’industrie", quasi bienfaiteur de la société. Les privilèges sont assimilés à l’intérêt collectif. . Les nantis ont renversé la sémantique, séquestré les mots et la démocratie. Les chômeurs deviennent des "perdants" (tant pis pour eux), les licenciements : des "ajustements de personnel"... Relevons la tête. Partons à la reconquête des idées et des mots ("révolution", "socialisme"...). Repolitisons. Reconstruisons les idéologies. Brisons les verrous. Perdons la peur... de perdre des voix. Un gouvernement qui prend aux pauvres pour donner aux riches devient un gouvernement de "voleurs". Il ne représente pas le peuple. Un gouvernement qui tourne le dos à ses promesses progressistes dérive vers un gouvernement de "voleurs". Oui "voleur", au sens du "Petit Robert" : "personne qui s’approprie ou s’est approprié, par ruse ou par force, le bien d’autrui". Pour illustrer le dico, les exemples abondent : l’impôt, qui frappe surtout les moins riches, l’augmentation de la TVA, la perte de pouvoir d’achat, le prix de l’essence, la ponction sur les salaires, les pensions, l’allongement de la durée de cotisation et de l’âge de départ à la retraite, l’irresponsable "pacte de responsabilités", le putsch du "traité transatlantique"... Quand un gouvernement abaisse son pays, fait les poches du plus grand nombre et épargne les grandes fortunes, quand il fait souffrir son peuple, il ne mérite que le mépris, et le combat de classe.

La crise est une escroquerie. Il convient d’en poser le diagnostic avec lucidité et dénoncer avec colère l’ ouragan destructeur qui nous emporte, qui marchandise tout ; cela me paraît fondamental. La crise est un hold-up organisé. On ne lèvera jamais assez le ton , on ne s’indignera jamais assez face à de telles régressions, face à de telles douleurs, à de tels dégâts humains, sociaux, environnementaux, provoqués par l’actuel "modèle économique" hégémonique, le capitalisme "néo-libéral". Et appelons un chat un chat. Le parti socialiste (ce qui ne veut pas dire tous ses militants et électeurs) s’est rallié au néo-libéralisme avec enthousiasme, et appelle donc sanction populaire. Il a rejoint objectivement le camp de nos adversaires de classe. Il contribue ainsi à l’affaiblissement du mouvement syndical, social, au "on a tout essayé", au brouillage des repères droite/gauche, à la crise des valeurs. Il aggrave la situation préoccupante d’aujourd’hui, où ce qui reste de démocratie est menacé, où la droite, obscurantiste, arrogante, triomphante, mâtinée de totalitarisme, mène l’offensive, où le Medef gouverne, où la "bête immonde", à visage souriant, se renforce sur les frustrations et le désespoir populaires, sur le "tous pareil".

La montée de l’extrême droite , instrumentalisée, stimulée par les uns et les autres, puis utilisée comme repoussoir, menace nos libertés. On sait par expérience historique que les politiques antisociales provoquent un désarroi populaire manipulable...Les politiques migratoires, inhumaines, désignent le migrant, le pauvre, comme le bouc émissaire. Et pourtant ce ne sont pas les immigrés qui licencient, qui sabotent nos retraites, amputent

La situation présente de fortes similitudes avec les années 1930. Après les journées factieuses du début février 1934, les syndicats et la gauche appelèrent à la riposte de masse, de rue.

Où est aujourd’hui l’indispensable riposte progressiste ? Elle est sous-estimée dans les discours, les écrits, les appels. Elle n’est pas à la hauteur des régressions sociales et démocratiques que nous vivons. La droite fachote manipule d’imposantes manifestations conservatrices ; elle s’est emparée de la rue, instrumentalise les victimes de son "modèle économique". Le latifundium médiatique distille la manipulation et le mensonge permanents au nom d’une démocratie-démocrature. "Ils l’appellent démocratie, mais elle ne l’est pas", criaient les "Indignés" Puerta del Sol. Lorsque les gouvernements disent qu’ils ne peuvent rien face aux marchés ; la démocratie devient une farce. L’Allemagne veut nous mettre à genoux et nos gouvernants s’agenouillent avant même qu’on ne le leur demande. L’extrême droite boit du petit lait.

Pour combattre l’extrême droite il faut lutter contre la soumission et l’austérité. La lutte est toujours facteur de solidarité. Elle solidarise les travailleurs, français et immigrés. En 1936, le racisme recula.

Refusons donc toute banalisation (ou toute reprise "de gauche") des discours et violences racistes et xénophobe.

Ne lâchons plus la colère, le cri, la passion, l’utopie, la révolte, l’indignation politique et morale. Je sais, cela n’est pas suffisant, mais cette fonction fait partie de notre identité communiste, de notre rôle de révolutionnaires. Aidons les exploités à passer de la douleur à la connaissance, au savoir, à la conscience et à la mobilisation. Priorité au mouvement social, en bas. Ensemble, ouvrons le chantier de l’alternative anticapitaliste. Ne nous laissons plus dépouiller. Il nous reste la capacité de dire "non" à ce monde, et notre dignité, inaliénable.

La volonté de pouvoir, de rupture avec le capitalisme, se construit sur le refus du système et sur des propositions alternatives claires, offensives, concrètes. "NON" : ce monde n’est pas le nôtre. Arrêtons de tenter de ménager ce qui ne peut l’être. "Dans une barricade, il n’y a que deux côtés" (Elsa Triolet)

Jean Ortiz

COMMENTAIRES  

20/02/2014 12:53 par Geb.

Ca symbolise quoi le geste sur les photos ??,

La longueur de celle qu’ils nous mettent ?

Une double "quenelle" salut nazi sans les bras ?

Ou les deux à la fois ?

Geb.

20/02/2014 13:50 par Dwaabala

Sur le photo des tenailles, la gauche : c’est bien un câble haute tension ?

20/02/2014 14:20 par BQ

Autant le développement durable fait croire que l’on pollue moins pour polluer plus longtemps et pérenniser le capitalisme.
Autant le PS fait croire qu’il est de gauche pour nous polluer plus longtemps les conditions de vie et pérenniser le capitalisme.

Espérons qu’une majorité de gens voient en ces dirigeants du PS/UMP et du FN, un ramassis de "managers" destinés à "rentabiliser économiquement" la multinationale France pour "redonner de la confiance aux marchés" tout en réduisant ces charges (santé, éducation, salaires, population, étrangers, ...etc) et non des gens qui ressemblent aux exploités, qui sont conscients de leur vie, de ce que signifie une baisse de salaire ou de retraite, une fermeture de maternité, d’organisme public, de perdre son boulot, de ce que signifie être vu comme un voleur alors que l’on vit et travaille ici,...

PS : Je souhaiterais savoir si LGS avait entendu parler de la résolution du Conseil d’Etat qui s’était prononcé, en quelques heures, sur le "double salut nazi à 90°" symbole du changement c’était maintenant (voir images ci-dessus) ?

20/02/2014 16:07 par Lionel

Plus nous offrons de points de résistance au système capitaliste et plus il créera de nouvelles défenses le conduisant vers une surpuissance elle-même accélérant son auto-destruction...
Alors résistons, partout de toutes les manières y compris les plus humbles et anonymes, créons des foyers, des "niches" ( Bourdieu ), les idées sont probablement plus contagieuses que le virus Ébola !

20/02/2014 16:33 par erwin

la revanche des classes dominantes sur 1789

Paaaardon ?!
Les classes dominantes sont devenues dominantes grâce à 1789 !

20/02/2014 17:48 par Letzte Ölung

À l’échelle universelle, « la civilisation » humaine terrestre n’en est qu’à ses premiers balbutiements, ce qui la rend extrêmement instable et dangereuse pour l’univers et pour elle-même..... !
Ce qui rend ce genre d’humain extrêmement dangereux c’est le fait de se prendre pour Dieu et d’avoir oublié qu’il n’est qu’un prédateur un peu plus éveillé que les autres qui essaye toujours de péter plus haut que son cul sans jamais y arriver, alors il devient menteur voleur et agresseur et destructeur..... !
Then, “You will learn at your expense that the shock wave is due to the butterfly effect, "but" who sows the wind harvest storm” Chris.....(mdr)

20/02/2014 22:12 par Aodren

@Erwin

C’est exact mais il y eu plusieurs mouvements de progrès et de réaction rapides comme dans toute révolution. Mais malgré la victoire des esclavagistes girondins lors de la terreur termidorienne, le résultat de 1789 est encore trop progressiste pour les oligarchies actuelles. Je pense à la déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui, si elle était appliquée réellement, amènerait un grand progrès.

21/02/2014 02:55 par erwin

@ Aodren :

Mouais, la DDHC est entre autres l’acte de naissance de l’hégémonie du grand capital. Elle affirme :
- le droit à la propriété (individuelle, hein, et illimitée bien sûr !), notamment celle des moyens de production
- le droit à la sûreté (au cas où, par exemple, des travailleurs voudraient s’emparer de ladite propriété, on y cogne su’l’gueul’)
- le droit à la liberté (de faire ce qu’on veut avec ce qui nous appartient, au hasard les moyens de production, genre les usines et les ouvriers qu’il y a dedans), définie comme le droit de faire tout ce qui ne nuit pas à autrui (ce qui nuit à autrui étant défini par la loi, qui borne cette liberté, loi élaborée par les "représentants du peuple"...donc les bourgeois, pardi ! ou leurs laquais)
- le droit de résistance à l’oppression (au cas où il y aurait -on ne sait jamais...- un gouvernement de gauche qui serait tenté de s’emparer des fameux moyens de production privés)

Et puis en passant ils ont fait voter des lois vachement progressistes, genre loi Le Chapelier, 1791, c’est pratique çà comme loi pour les grands patrons, et il a fallu l’attendre un moment la loi Waldeck-Rousseau...

Donc je persiste, mais ce n’est pas bien grave : la(les) classe(s) dominante(s) actuelle(s) doi(ven)t tout à la Révolution.
Nous aussi on lui doit beaucoup, par exemple je pense qu’on lui doit de faire triompher certains de ses principes, après les avoir soigneusement expurgés de la pensée bourgeoise qui les souille.

23/02/2014 23:30 par Dwaabala

La Révolution est une révolution bourgeoise qui a mis en mouvement les masses populaires et a su s’appuyer sur elles pour mettre à bas le régime clérical et féodal.
La République bourgeoise, démocratique, est un régime de compromis qui a su se concilier les masses qu’il évite de mettre en mouvement, sauf dans des circonstances particulières. Mobilisation générale par exemple.

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