kephil, les chiffres que tu cites sont les dépenses militaires totales, pas les achats d’armes. Voir par exemple http://fr.wikipedia.org/wiki/Forces_arm%C3%A9es_grecques , article qui confirme que la Grèce est bien le 4ème acheteur d’armes au monde. Cet article confirme aussi que la raison qui pousse la Grèce à s’armer autant est la concurrence avec la Turquie.
Pour en savoir plus, une petite recherche m’a amener sur cet article : http://www.marianne2.fr/La-Grece-est-endettee-mais-surarmee-Cherchez-l-erreur_a207086.html
On y apprend bien des choses :
"Entre mars 2005 et septembre 2008, les engagements des banques d’Europe occidentale en Grèce ont doublé. Ils sont passés de 80 à 160 milliards de dollars US. Parmi les établissements financiers les plus généreux, on retrouve des banques françaises, elles sont détentrices de prés d’un tiers de la dette publique grecque. N’oublions pas leurs consoeurs allemandes, elles s’adjugent 15% des créances prises sur l’Etat grec."
"en 2009, la Grèce a occupé le quatrième rang mondial des importateurs d’armes. Pour y parvenir, le gouvernement en place mit littéralement le paquet : 1,269 milliard de dollars US fut consacré à cet objectif.
Ce chiffre en tête, on ne s’étonnera pas du rapport existant, en Grèce, entre PIB et budget de la défense : ce dernier en représente 4,3%. A titre de comparaison, la France, laquelle dispose pourtant d’une force de frappe et se trouve engagée dans deux conflits (Afghanistan, Libye), ne consacre que 2,2% à ce même budget.
Mais ceci n’est rien.
Car en se livrant à une rétrospective, on constate que depuis dix ans la Grèce occupe, vaille que vaille, cette quatrième place mondiale des importateurs d’armes. Cette position continuelle au sein du Top 10 des acheteurs a nécessité des investissements, non seulement massifs, mais colossaux : 11, 209 milliards de dollars US ont été engloutis pour y parvenir !"
"Hasard ou coïncidence : en pleine crise des « subprimes » l’Etat grec regorge de liquidités … pour acheter des armes
Entre décembre 2005 et mars 2007, d’une part, entre juin 2007 et le second semestre de l’année 2008, d’autre part, des liquidités en grand nombre ont pris le chemin de la Grèce. Lors de la première séquence, le volume des prêts consenti par les banques à l’Etat grec a augmenté de 50%, passant d’un peu moins de 80 milliards à 120 milliards de dollars. Lors de la seconde séquence, ce volume a connu une seconde nette augmentation - 33% - passant de 120 à 160 milliards de dollars.
Ce qu’il y a d’intéressant avec cette seconde séquence, c’est qu’elle coïncide avec deux choses.
D’abord, elle coïncide avec la crise des « subprimes ». Ainsi, au moment où les démon de la crise et autre spectre de l’Apocalypse financier hantent l’Europe, provoquant une recapitalisation massive du secteur banquier privé par les Etats, « on » sait trouver - au sein de ce secteur banquier - des liquidités pour les faire converger vers la Grèce.
Ensuite, elle intervient à un moment très dense pour le business de l’armement en Grèce. Comme le signale, en effet, un rapport de l’OTAN, entre 2005 et 2009, la Grèce a vu ses dépenses d’armement grimper d’un tiers, passant de 5,4 à 7,3 milliards de dollars. Il faut dire que cette période est une période-clef : la Grèce y est particulièrement active en matière de pourparlers, négociation de contrats, achats fermes ou … dettes enfin honorées.
Mais le plus intéressant, c’est cette autre coïncidence : les banques les plus généreuses appartiennent toutes à ces (mêmes) pays dont les entreprises d’armement réalisent un si bon business au pays des Hellènes.
Alors … que penser de cette superposition d’évènements ?
On peut en tirer quatre enseignements :
1. l’Etat grec, déjà endetté, a pourtant reçu de nouveaux concours financiers le dotant d’un pouvoir d’achat totalement artificiel.
2. une partie non négligeable de ce pouvoir d’achat artificiel a été consacré à des acquisitions massives d’armement.
3. l’origine de ce pouvoir d’achat artificiel tient à des concours financiers de banques de même nationalité que les entreprises fournisseuses d’armement.
4. ces concours financiers n’ont pu être réalisés qu’en utilisant les sommes données par les Etats afin de recapitaliser les banques menacées de déconfiture par la crise des « subprimes »"
Hallucinant ! surtout en considérant le point 4. !
Et ce n’est pas fini.
"... On peut citer des achats emblématiques : avions de combat made in USA pour plus de deux milliards de dollars US, bis repetita avec des Mirages 2000 made in France pour 1,6 milliards d’euros, et, last but not least, acquisition de six sous-marins made in Germany pour, excusez du peu, 5 milliards d’euros."
Je passe sur l’affaire de pots de vin de Siemens qui porte sur environ 1 milliard d’euros entre 1990 et récemment, c’est à dire en plein dans la période qui nous intéresse.
Quand à la France, elle a recouru au chantage : ".N. Sarkozy et F. Fillon se seraient adressés en ces termes à G. Papandreou : « Nous allons lever des sommes pour vous aider, mais vous devez continuer à payer les contrats d’armements qu’on a avec vous, signés par le gouvernement Caramanlis. »"
"Le cynisme de l’Oncle Sam : encourager le surarmement turc pour pousser les Grecs à la dépense"
"Les choses ont, néanmoins, fini par bouger … mais côté turc seulement. Ceux-ci ont fait, en 2010, des propositions de limitations budgétaires à la Grèce soient - 20%. Sans succès, alors qu’en 2009 la Turquie n’occupait plus que le dixième rang des importateurs mondiaux d’armement après avoir occupé constamment la sixième place de 1998 à 2008.
Ce refus grec trouve son explication dans un réflexe quasi-conditionné de course aux armements, réflexe savamment entretenu par les USA, notamment pour ce qui a trait au domaine aérien.
En la matière, les Turcs ont toujours bénéficié des meilleurs « produits » made in USA. Avant le programme de restriction budgétaire turc, cela se traduisait sous forme de pléthore. Depuis, cela se traduit sous forme de qualité puisque la Turquie participe au programme de cofinancement du F.35 avion de supériorité aérienne de conception principalement américaine. Or, dés que la Turquie jouit d’un avantage technologique, la Grèce, aussitôt, agit pour obtenir le même, à l’identique ou de même niveau. C’est la raison pour laquelle, et pendant des années, les mêmes avions de combat US - F.16 notamment - ont porté les cocardes grecques et turques, c’est la raison pour laquelle la Grèce s’interroge actuellement quant à la modernisation de tout ou partie de son aviation de combat. Ce qui explique que le Rafale français soit sur les rangs. Ce qui explique que des propositions américaines soient en discussion … .
Voilà donc un de ces paradoxes au parfum d’ironie : deux pays, deux voisins, pourtant membres de la même alliance militaire (OTAN), laquelle est largement tributaire des options et volonté américaines, se retrouvent en situation de guerre froide, et ceci, sans que cette appartenance commune à l’OTAN ne permette, ni détente et apaisement, ni règlement diplomatique définitif.
Que l’on ne dise pas que cette situation n’est pas voulue … ."
"- 2000 à 2009 soit la période 1 : la Grèce honore ses contrats et paye ses fournisseurs et envisage le maintien de sa politique de dotation en matériel militaire ;
– après 2009 soit la période 2 : la Grèce connait des incidents de paiement et décide d’infléchir sa politique de dotation en matériel militaire, ou en rediscutant les termes des marchés, ou en y renonçant purement et simplement.
La période 2 est extrêmement intéressante car elle voit la concordance de deux épisodes. Il s’agit, en l’occurrence, de la virulence de plus en plus grande des critiques allemandes vis-à -vis de la Grèce, laquelle virulence, et cela ne peut découler que d’un pur hasard, apparaît et monte en puissance à partir du moment où des groupes allemands - de l’industrie navale militaire - font face à des impayés grecs voire à des contestations relatives aux performances et qualités des matériels livrés … .
Bref, tant que les déficits publics grecs permettent de commander et payer du matériel allemand, M. Baroso et Mme Merkel les considère comme vertueux. Mais … dés que ses déficits ne le permettent plus, ils deviennent scandaleux. Et, à peu de chose prés, les pensées de MM. Sarkozy et Fillon et ceux de Mme Lagarde s’inscrivent dans le même ordre d’idée sauf qu’ils concernent des contrats français. "
Hallucinant ? Non, simplement de la real politique.