Les réactions n’ont pas tardé à fuser : « le texte du TPP que nous avons pu découvrir aujourd’hui révèle une terrible mais non surprenante vérité : voilà un accord négocié dans un secret total, notamment avec les entreprises mais sans le public, et qui apparaît comme la liste des vœux anti-utilisateurs émise par l’industrie », résume l’Electronic Frontier Foundation.
S’il devait effectivement s’appliquer, le traité étendrait au monde entier quelques-uns des pires aspects de la loi étasunienne en matière de copyright : octroi d’un plus grand nombre de brevets, création d’une propriété intellectuelle sur les données, extension des termes de protection pour les brevets et le copyright, accroissement des privilèges des ayants-droits, création d’un tribunal spécial qui instruira les violations de brevets avec à la clé augmentation des peines pour infraction à la propriété intellectuelle.
Les nations impliquées pour le moment dans les négociations sur le TPP sont au nombre de douze : les États-Unis et le Japon (qui sont respectivement la première et la troisième économies mondiales) auxquels il convient d’ajouter le Mexique, le Canada, l’Australie, la Malaisie, le Chili, le Vietnam, le Pérou, la Nouvelle-Zélande, le sultanat de Bruneï et Singapour.
Le texte du traité révèle que les pays en question sont prêts à sacrifier les droits de leurs citoyens afin de parvenir à un nouvel accord commercial avec les États-Unis. L’Europe n’est pas en reste et rien ne dit à l’heure actuelle qu’elle ne leur emboîtera pas le pas. D’ailleurs, le projet de « Grand Marché Transatlantique » EU-Canada-UE prévoit lui aussi un nouveau bond dans l’intégration supranationale néolibérale.
La Chine, la Russie, l’Inde et l’Iran ont naturellement été tenus à l’écart des négociations. Alors que, parmi les nations en lice, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et le Chili sont en train d’examiner les intérêts qu’ils auraient à signer un tel traité, la publication des documents par Wikileaks y a tout aussi naturellement fait l’effet d’une bombe.
Matthew Rimer, expert en propriété intellectuelle, explique à quel point le projet de traité fait peu de cas des droits et des intérêts des consommateurs : « on pourrait voir le TPP comme une liste de cadeaux qu’auraient faite les grandes entreprises pour Noël, et ce qui concerne le copyright s’inscrit parfaitement dans ce cadre. Hollywood, l’industrie de la musique, les grandes entreprises informatiques comme Microsoft, le secteur pharmaceutique seront ravis ».
Selon des rumeurs publiées dans certains journaux en Australie, le TPP a été très fortement soutenu par Obama. Ce dernier aurait également tenu à le garder sous silence. Plus de six cents consultants d’affaires, appartenant tous à des lobbies économiques ou commerciaux, auraient contribué à la rédaction du texte. Pour les opposants au traité, « les États-Unis apparaissent comme l’un des pays les plus liberticides. Même les libertés des consommateurs y sont aujourd’hui menacées ».
Selon Julien Assange, rédacteur en chef de Wikileaks, « si ce traité est institué, le régime de propriété intellectuelle du TPP piétinera les droits individuels et la liberté d’expression et foulera aux pieds le patrimoine intellectuel et créatif. Si vous lisez, écrivez, publiez, écoutez, dansez, chantez ou inventez, si vous cultivez ou consommez des aliments, si vous êtes malades ou si un jour vous tombez malade, le TPP vous a dans sa ligne de mire ».
Capitaine Martin