Chère rédaction de Libération
En apprenant le plan social dont vous êtes victimes, ma première réaction a été : "ils ne l’ont pas volé".
Vous êtes vous assez moqué des travailleurs qui résistaient, tous ces "crétins" qui votaient "NON" parce qu’ils craignaient les délocalisations, les plans sociaux, le chômage.
Combien d’entre eux ont connu, après la perte d’un emploi,la destruction de leur vie familiale et parfois la rue. Sans susciter de votre part autre chose que de l’indifférence.
Même attitude sur le plan international, les peuples qui résistaient n’avaient droit qu’à votre "politiquement correct"Je pense au peuple cubain dont vous n’avez jamais dénoncé le blocus subi et les attentats terroristes made in USA, qui ont fait plus de 4000 victimes et autant de blessés à vie. Non il fallait répéter "la doxa"du champ médiatique. Et avec quel cynisme.
Vous censuriez sans état d’âme tout ce qui n’allait pas en ce sens. (1)Et vous transformiez le peu ragoutant Robert Ménard en idole de la profession. Alors que non seulement celui-ci n’attaquait que les pays qui résistaient à l’impérialisme nord-américain et considérait que la situation de la presse était meilleure en Colombie qu’à Cuba où plus de 200 correspondant étrangers peuvent faire leur métier en toute quiétude.Alors qu’en Colombie, les journalistes sont assassinés et qu’à Cuba ils ne sont inquiétés que s’ils reçoivent leurs émoluements des USA. (2)
Robert Ménard qui a défendu une vision corporatrice de la presse, digne d’un fascisme, où les patrons de presse et les journalistes étaient confondus dans une même défense de "la liberté de la presse". Cette liberté là correspond aussi peu au droit de l’information du citoyen, que la liberté des trusts de l’agro-alimentaire est une garantie pour le consommateur du droit à une alimentation saine. Vous vous en apercevez aujourd’hui avec votre patron Rothschild et le directoire qui lui obéit. Les anciens maos à la July...
Souvenez-vous de ce que Bourdieu disait de vous les journalistes :" Il faudrait d’abord réflechir sur la représentation que le champ journalistique a et donne de lui-même. Il y a une idéologie professionnelle du journalisme selon laquelle les journalistes apportent la vérité, l’information, la critique, la subversion. Or cette image de soi est contredite par l’analyse et l’observation ; elle n’est pas fondée. je ne pense pas que les journalistes soient les mieux placés pour donner l’accès à l’espace politique. Ils contribuent au contraire assez fortement au maintien de la frontière, de la censure qui tend à exclure les manières non conformes à l’orthodoxie, à la doxa du champ politique. (3)
Malgré tout cela, parce que vous êtes des travailleurs, avec votre syndicat et que dans le fond, il y a quelques héros dans votre profession, parce que le chômage est un drame pour tous, même pour vous. Et que plus vous serez sur des sièges éjectables, moins vous aurez le courage de vous opposer à ce qu’on veut vous faire dire.Enfin parce que moins aurez la possibilité de faire des enquêtes sur le terrain, plus vous vous contenterez de répéter des dépêches d’agence en ignorant ce dont vous parlez, donc pour toutes ces raisons, je vous apporte mon soutien.
Danielle Bleitrach
(1) Comme vous n’avez jamais publié les nombreuses lettres de rectification que nous tentions de vous adresser pour rétablir les faits, comme vous avez censuré impitoyablement nos livres (Cuba est une île : Danielle Bleitrach et Viktor Dedaj(2004)... DE MAL EMPIRE, ces leçons de résistance qui nous viennent du sud(2005)) livres qui s’appuient cependants sur des FAITS averés, alors que vous accordiez toute publicité à des montagnes de malveillance et d’ignorance comme Castro l’infidèle de Raffy.
(2) Quand on voit comment après huit jours de désordres urbains, où on est passé de 200 voitures brûlées quotidiennement à l’ordinaire à 500, la France entière et vous mêmes ont accepté sans piper mot un état d’urgence pour trois mois qui interdit réunion et manifestation et qui n’avait pas été appliqué depuis la guerre d’Algérie, quand on voit comment Sarkozy est en train sous couvert de terrorisme de nous faire accepter des loins d’exception qui se retourneront contre les travailleurs en lutte, oser vous indigner que Cuba qui subit terrorisme et blocus depuis plus de quarante ans cherche à se prémunir, n’est-ce pas sortir les faits de leur contexte ?
(3)Propos sur le champ politique.Presses Universitaires de Lyon.2000.